Vendredi dernier, notre analyse matinale était dédiée aux craintes soulevées par le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, quant au dossier grec. Et pour cause ! Depuis ses propos fracassants (voir notre analyse du 17 avril), les indices européens et la devise unique semblent totalement obnubilés, une énième fois, par un potentiel Grexit. Rappelons que demain se tiendra à Riga (la capitale lettone) une nouvelle réunion des ministres des Finances de la zone euro. Ce sommet aurait dû permettre le déblocage d’une aide de 7,2 milliards d’euros à Athènes ; une aide attendue depuis l’été dernier. Mais tout laisse penser que la rencontre sera un échec. Décryptage.
Pourquoi remettre à demain ce que l’on peut remettre à après-demain ?
Schäuble, sans doute l’un des décideurs actuels les plus influents en Europe, avait anticipé la semaine dernière (et ce, publiquement) un échec de cette rencontre. A cela s’ajoute le fait que le gouvernement Tsipras ne présentera aucune liste de réformes économiques demain. Pour quelle raison ? « Simplement » car Athènes estime que le pays devrait rester solvable jusqu’au mois de juin. A nouveau : « devrait » rester solvable jusqu’au mois de juin. Pas de quoi s’enthousiasmer pour le lecteur attentif qui remarquera que le mois de juin se présentera à nous dans cinq semaines. Malgré tout, cette fameuse liste de réformes tant analysée, tant décriée, tant dénoncée ces dernières semaines (et que nous couvrions via nos analyses matinales) devrait être renforcée et présentée à nouveau dans le mois à venir selon Thomas Wieser, responsable du groupe de travail de l’Eurogroupe préparant les décisions des réunions ministérielles, comme le précisent Les Echos.
L’intéressé a notamment commenté il y a quelques heures : « L’heure tourne. Il n’y aura pas de liste (de réformes) à Riga, mais dans le courant du mois de mai, il faudra bien qu’elle soit remise […] La situation de la Grèce en termes de liquidités est déjà un peu tendue mais celle devrait suffire jusqu’en juin ». En d’autres termes : circulez, il n’y a rien à voir. Mais que l’on ne s’y trompe pas, Athènes devra bel et bien rembourser plus d’un milliard d’euros au FMI le mois prochain, sous la forme de deux versements. Détail qui a son importance quand on se replonge dans le contexte boursier de fin mars / début avril, avec un risque de défaut du pays pour un versement moitié moins important. Ces dernières semaines, nous nous sommes efforcés d’attirer votre attention sur ce vecteur, ainsi que sur les attentes de relèvement des taux américains.
Vous l’aurez donc compris : nous en ferons de même aujourd’hui et pour les prochaines séances. Si le temps joue toujours en faveur d’Athènes (l’Eurogroupe ne souhaitant pas un Grexit … naturellement), il faut tout de même préciser que Tsipras joue un jeu dangereux. En effet, ses marges de manœuvre sont extrêmement limitées : entre promesses électorales et pressions diplomatiques. A ce stade, il semble clairement perdre la main, au risque de décevoir la frange radicale de Syriza. Mais … car il y a un « mais », l’Eurogroupe risque de plier à nouveau dans les prochaines semaines, en urgence, avant cet énième risque de défaut de paiement annoncé pour juin. Mois qui, rappelons-le, coïncide avec l’échéance fixée par l’Eurogroupe pour trouver un nouveau pansement provisoire avant de se replonger dans ce dossier explosif dans quelques mois … au risque de jouer avec les populismes nationaux. D’ici là : notre trame boursière sera très fortement orientée selon les tacles, phrases assassines et rumeurs autour de ce dossier. A suivre durant notre Good Morning Market à 10h30 et pendant notre séance de Live Trading à 15h15 !
Dorian Abadie
Analyste Marchés
XTB France