L'éditeur allemand Axel Springer (XETRA:SPRGn) a affiché mercredi sa détermination dans sa bataille avec Google (NASDAQ:GOOGL) sur la propriété intellectuelle, après un troisième trimestre qui consacre le virage numérique du groupe.
Le groupe, propriétaire de Bild, le quotidien le plus lu d'Europe, et du journal conservateur Die Welt, est en pleine restructuration face au déclin de la presse écrite, après s'être séparé de sa galaxie de titres et médias régionaux.
Ses investissements numériques - le groupe est propriétaire d'une kyrielle de sites internet dont en France SeLoger et Aufeminin- ont pesé sur sa rentabilité en 2013, et l'année 2014 doit être celle du retour aux profits. Le troisième trimestre a ponctué d'un petit accroc ce scénario, avec une rentabilité moindre que prévu par les analystes.
Mais il a surtout été marqué par l'assombrissement de l'horizon de la presse écrite en Allemagne, corroboré d'ailleurs par les difficultés du concurrent Gruner + Jahr (Geo, Gala), qui a annoncé récemment 400 suppressions de postes.
Pour sa part, "Axel Springer réalise de bons progrès sur le chemin qui le mène vers une société d'édition numérique", s'est réjoui le patron du groupe Mathias Döpfner lors d'une conférence téléphonique.
- Bras de fer avec Google -
Mais "Axel Springer est et reste une maison pour le journalisme de qualité", a-t-il ajouté, pointant notamment la hausse "solide" des abonnés pour les éditions numériques de Bild et Die Welt, ainsi que la coentreprise annoncée en septembre avec le très pointu site d'informations Politico. L'américain veut désormais lancer une version européenne de son concept, basée à Bruxelles.
Le journalisme numérique porté par Axel Springer rencontre d'autres obstacles. L'éditeur est l'un des principaux membres de la coalition VG Media, lancée dans un violent bras de fer avec Google sur la question de la propriété intellectuelle.
Le géant américain ampute depuis le 23 octobre les résultats de recherche des sites de quelque 200 médias de la coalition, au premier rang desquels les têtes d'affiches Bild et Die Welt.
Les photos miniatures et résumés des articles sont désormais supprimés, seuls les titres apparaissent.
Les éditeurs veulent faire payer Google, qui utilise gratuitement ces "snippets". Le moteur de recherche a donc choisi de ne plus les faire figurer.
Mathias Döpfner a reconnu que "la nuisance est considérable". Après deux semaines sous la sanction, Axel Springer a enregistré une chute "de presque 40% du trafic" sur ses sites welt.de, computerbild.de, sportbild.de et autobild.de.
Le groupe est en train "de documenter précisément" les conséquences de ce conflit et partage ses données pour nourrir le débat public, a-t-il ajouté.
"L'enjeu est de fixer les différentes possibilités de la concurrence dans le monde numérique", a souligné le patron de presse, en appelant les " politiques et les autorités de la concurrence" à se saisir du débat.
- La Bourse ravie -
En attendant, les chiffres du troisième trimestre d'Axel Springer ravissaient la Bourse mercredi. Son excédent brut d'exploitation (Ebitda) a augmenté de 1,9% sur un an à 97,8 millions d'euros, moins que prévu par les analystes, mais l'éditeur a maintenu ses prévisions de bénéfices pour cette année.
Tiré par les sites de petites annonces en ligne, le chiffre d'affaires a grimpé nettement plus que prévu, avec une hausse de 8,2% à 741,1 millions d'euros.
La division petites annonces devient d'ailleurs "le plus gros contributeur" pour la rentabilité (Ebitda) du groupe, note Harald Heizer, un analyste de DZ Bank.
A la Bourse de Francfort, le titre Axel Springer était largement en tête du MDax des valeurs moyennes avec un bond de 4,78% à 44,72 euros, dans un marché en hausse de 0,8% à 13H08 GMT.