Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Il serait illusoire d’imaginer pouvoir appliquer en Italie la stratégie qui a permis de sauver Banco Popular (MC:POP) en Espagne via un rachat par sa compatriote Santander, sous la houlette de la Banque centrale européenne (BCE) qui a fait jouer le nouveau mécanisme de sauvetage des banques. Or… des signes d’un nouveau stress s’amoncellent… Les taux recommencent à fléchir partout dans le monde depuis que la Fed a publié un communiqué qu’elle a voulu le plus neutre possible mais qui a été interprété comme une nouvelle preuve qu’elle navigue à vue et qu’elle reste bien consciente du danger de poursuivre son cycle de hausse de taux dans un contexte de croissance incertaine.
Les risques pointent de nouveau en direction de la déflation… Et ce n’est pas une bonne nouvelle pour les banques – encore moins pour les compagnies d’assurance, les organismes de gestion des retraites, etc. Quel sera leur degré de résilience si les marges s’écrasent à nouveau, comme le préfigure le récent aplatissement de la courbe des taux ? Comment les banques italiennes encaisseront-elles un nouveau choc déflationniste alors qu’elles croulent déjà sous les mauvaises dettes ?
Les marchés et la sphère financière se félicitent du « sauvetage » de Banco Popular… « Les 60 Mds€ de dépôts des épargnants ont été préservés et pas un euro de fonds publics n’a été injecté », selon le ministre de l’Economie Luis De Guindos. Happy end et fin de l’histoire ? Pas si sûr !
La ruine des petits actionnaires
Selon le quotidien économique l’Expansion, des collectivités locales et de grands fonds d’investissement ont curieusement retiré les dépôts confiés à Banco Popular quelques jours avant la faillite, siphonnant ses fonds propres et faisait s’effondrer ses ratios de solvabilité. Alors que la valeur de Banco Popular était évaluée entre 2 et 8 Mds€ jusqu’à tout récemment, elle est tombée à 1 € symbolique… et il a fallu y injecter 8 Mds€ en urgence. Alors que les ventes à découvert son en principe interdites contre les banques, Banco Popular a continué de subir des attaques qui ont redoublé avec la rumeur du retrait de capitaux de diverses institutions financières (où se situe la frontière entre la malveillance et le délit d’initié ?). Certains petits actionnaires, qui ont cru que les mécanismes de protection seraient activés, ont tout perdu puisque le titre a chuté à 0,31 € alors que l’augmentation de capital a été réalisée il y a un an à 1,25 €. 9500 petits actionnaires accusent par ailleurs l’ancienne direction de Popular et le cabinet d’audit PwC « d’escroquerie » et de « falsification comptable » lors de l’augmentation de capital de juin 2016 qui était sensée remettre la banque sur de bons rails pour des années. Et que de dire de la BCE qui lui a délivré son brevet de « solidité » à toute épreuve lors du dernier « stress test » ?! Banco Popular va au tapis alors qu’il n’y a même pas eu de choc sur les marchés financiers : aucun stress, aucun choc et BPOP s’est effondrée !
Conclusion pas rassurante : si d’autres banques italiennes ou espagnoles devaient faire l’objet d’une perte de confiance (malgré un satisfecit de la BCE), l’interdiction des ventes à découvert ne s’appliquerait probablement pas… et celles dont les clients sont les créanciers involontaires (via des produits obligataires « maison ») risquent de ne trouver personne pour voler à leur secours. C’est d’ailleurs toute la mise en garde de Simone dans son livre « Banques, vos vrais risques » qu’elle développe dans l’interview ci-dessous.