Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Les crypto-devises, et le Bitcoin qui constitue la plus emblématique d’entre-elles, ont replongé de 8% à 10% le lundi 26 mars. Le BTC, par exemple, perd 16% depuis le week-end dernier. La raison ? Encore une bad news pour les cryptos : après Google (NASDAQ:GOOGL) et Facebook (NASDAQ:FB), Twitter (NYSE:TWTR) veut imposer « une nouvelle règle » (en fait une sévère restriction) concernant les publicités sur les cryptomonnaies et en particulier sur les ICO.
ICO signifie Initial Coin Offering, soit l’équivalent d’une Introduction en Bourse pour une action mais version crypto par l’émissions de « jetons » (tokens) qui n’auront pour valeur que celle que fixe l’émetteur – s’il existe en face des souscripteurs assez naïfs pour s’imaginer détenir des parts d’une future mine de diamants numériques.
Les ICO sont des « châteaux en Espagne
Les ICO sont dans 81% des cas des « châteaux en Espagne » – ou des escroqueries pures et simples dans 15% à 25% des cas, selon l’étude publiée par les chercheurs de Satis Group LLC qui porte sur les émissions de tokens d’un montant de 50 M$ et plus en 2017. Mais le risque de perdre sa mise est en réalité plus élevé puisque, sur un total de 100 opérations ayant bénéficié d’une promotion sur les réseaux sociaux, 6% des ICO honnêtes sont abandonnées en cours de réalisation (les souscripteurs sont partiellement remboursés), 5% vont à leur terme mais les tokens ne sont pas cotés (difficile alors de négocier ses jetons).
Enfin, sur les 8% d’ICO qui réussissent (fonds levés et sécurisés, registre de transactions, feuille de route, liquidités), seul un quart a donné lieu à une appréciation de la mise de départ… mais ce pourcentage pourrait augmenter ou chuter en fonction de la tendance générale, guère favorable aux cryptos en ce moment. Les épargnants qui se font escroquer sont aussi victimes de leur manque de vigilance et de curiosité : s’ils analysaient (ou lisaient, au moins) en détail les white papers, ils réaliseraient que les émetteurs sont de pseudo-experts en cryptos et gourous des technologies disruptives sans aucune légitimité ni antériorité dans le domaine de la blockchain. Les descriptions d’équipes sont parfois complètement fictives, avec pléthore de CV aussi ronflants que bidons et que les futures cotations seront cantonnées à des plateformes confidentielles, enregistrées dans des paradis fiscaux, pouvant cesser leur activité du jour au lendemain.
Quand les médias sociaux se font gendarmes des cryptos
Bref. Entre les soucis de développement, et le blanchiment d’argent comme autre points noirs à l’univers crypto, il était temps que les réseaux sociaux mettent de l’ordre dans la profusion de publicités mensongères émanant de pseudos plateformes ou de spécialistes auto-proclamés exploitant cyniquement la naïveté des épargnants avec des accroches racoleuses et trompeuses. La réalité, c’est qu’en souscrivant à une ICO annoncée en grande pompe sur les réseaux sociaux, vous avez toutes les chances de vous retrouver propriétaire de jetons sans aucune valeur, ou de succomber à la promesse de participer à des programmes d’échange de cryptos convertibles en bons d’achats et points de fidélité négociables chez 40 000 commerçants dans le monde (chiffre réel multiplié par 100) – mais qui ne fonctionnent que si vous réalisez vos achats en ligne en Chine.
Les réseaux sociaux ont fini par se rendre à l’évidence que des milliers de faux profils et de faux comptes servaient à asseoir une légitimité toute aussi fausse, et que les apporteurs d’affaires ou les influenceurs touchaient des pourcentages élevés sur les sommes drainées vers les escrocs. Le commissionnement n’est pas répréhensible en lui-même : les rabatteurs plaident leur bonne foi pour échapper aux poursuites. Il ne reste alors aux victimes qu’à se retourner contre le réseau social lui-même et c’est ce que Twitter ou Facebook tentent d’éviter.