Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Donald Trump va pouvoir jubiler ! Le Dow Jones a en effet signé hier soir une neuvième séance consécutive de hausse, la douzième en quatorze séances, et son cinquième record absolu pour le seul mois de novembre (à un peu plus de 27 800 points). Un mois 100% « bull » donc, du moins à ce stade, avec un cumul de + 600 points sur l’indice historique (+2,2%) sans le moindre repli, ni retracement, même marginal.
Mieux : le parcours est presque sans faute depuis le 3 octobre (hormis trois consolidations de -1,2% le 8 octobre, de -0,95% le 18 et de -0,5% le 31), d’où un gain global de 6% suscité par la promesse – en forme de leitmotiv – d’un « accord commercial imminent » avec la Chine.
Sauf qu’en réalité, c’est du « Grand-guignol » puisque le gendarme (Donald Trump) n’attrape jamais Gnafron (Xi-Jinping). Selon le très sérieux Wall Street Journal, qui l’a rapporté hier soir, les négociations commerciales auraient même achoppé concernant les achats agricoles chinois, le volet du potentiel accord qui semblait le moins problématique, d’autant que cela répond à un besoin bien réel de l’Empire du Milieu.
Plus largement, Pékin, comme je ne cesse de le répéter, ne signera pas (jamais ?) un accord qui semble à l’avantage exclusif des États-Unis, encore moins sous la contrainte de tarifs douaniers déjà en vigueur ou à venir… Et si Wall Street a progressé de façon aussi systématique – voire obsessionnelle – depuis six semaines, on peut penser que cette ascension linéaire n’a pas grand-chose à voir avec un éventuel « armistice » dans la guerre commerciale sino-américaine.
Merci la FED !
Cette hausse doit en fait tout aux injections quotidiennes de la FED, et peu importe la dénomination technique qu’elle leur donne. La Réserve fédérale a encore rajouté 73 Mds$ sur l’interbancaire mardi soir, et si ces milliards ne se cumulent pas, ils augmentent néanmoins la liquidité de 60 à 75 Mds$, TOUS LES JOURS depuis mi-septembre.
C’est sans aucun doute possible la cause du triomphant « funiculaire algorithmique » haussier de ces six dernières semaines et c’est tellement vrai que le président américain nous en a livré malgré lui l’implacable démonstration. Il a en effet convoqué la presse mardi au sujet des droits de douanes, mais c’était un simple prétexte et il n’avait strictement rien à dire de nouveau sur le sujet ! C’était surtout l’occasion pour Donald Trump de tacler une nouvelle fois la FED et de rallier Wall Street à sa cause. « Si la FED avait collaboré avec la Maison-Blanche, les actions seraient beaucoup plus haut », a ainsi soutenu le chef de l’exécutif américain, pour qui elles se seraient envolées de… 30% dans cette hypothèse.
Qui peut douter depuis des mois et des trimestres que seule lui importe la hausse des indices boursiers ? Le président se moque bien que les valorisations soient stratosphériques car chaque nouveau record de Wall Street est présenté comme une victoire personnelle. 90% de ses tweets relatifs à l’économie ne semblent finalement avoir pour but que de se vanter d’être l’architecte d’une « économie plus forte que jamais » et de rappeler que Wall Street doit tout à son seul génie, et plus encore.
De son point de vue, sa réélection sera(it) la juste reconnaissance de la nation pour avoir fait progresser les cours de Bourse car le peuple se moque bien, au fond, de la réduction des inégalités et de la création de vrais « bons emplois » (et non pas de mini-jobs à temps partiel, mais qui font illusion lors du calcul mensuel des statistiques relatives au marché du travail).
Les adversaires de Trump (de l’intérieur ou de l’étranger) en sont convaincus : une stagnation de Wall Street au cours des prochains mois ou un épisode de repli douloureux du S&P500 à quelques semaines des élections lui seraient fatals.
Peut-être son sort va-t-il néanmoins se décider dès ce jeudi avec une nouvelle étape juridique cruciale dans la procédure pouvant conduire à sa destitution. Dans l’hypothèse où il serait blanchi concernant le dossier ukrainien, les demandes d’enquête sur les activités de la famille Biden en Chine adressées à Xi-Jinping – publiquement formulées devant la presse du monde entier mi-octobre – pourraient quant à elles lui coûter cher.
Et que penser de ce commentaire lâché lors de la conférence de presse commune avec RecepTayyip Erdogan mercredi soir ? « Je suis un grand fan du président turc », a déclaré Donald Trump, faisant publiquement part de son admiration à un dirigeant qui a soutenu l’Etat islamique durant cinq ans et qui menace l’Europe d’un raz-de-marée migratoire, lequel charrierait les ex-combattants de Daech, d’Al-Nosra et les fidèles d’Al-Baghdadi dont il a commandité l’élimination.
Last but not least, Erdogan est l’un des plus acharnés adversaires de la famille régnante d’Arabie Saoudite, un autre allié historique des Etats-Unis. Si les mots ont un sens, que doivent en penser les européens ? Et « MBS » ? Et Vladimir Poutine ?