L'effondrement sans précédent des prix du pétrole aux États-Unis a mis sous le feu des projecteur la question cruciale du stockage de pétrole.
Alors que la crise du coronavirus continue d'écraser la demande mondiale, le monde est inondé de pétrole et manque rapidement d'endroits où le conserver.
C'est ainsi que le contrat de mai pour les contrats à terme West Texas Intermediate des États-Unis est tombé en territoire négatif pour la toute première fois lundi. Fait remarquable, cela signifiait que les opérateurs devaient effectivement payer pour que le pétrole leur soit retiré, ce qui s’explique en partie par le coût et les risques techniques impliqués par l’arrêt des puits de pétrole.
On a estimé que les fluctuations brutales du contrat WTI de mai cette semaine ont été exagérées par son expiration imminente, ce qui fait craindre à beaucoup que la situation ne se répète lorsque le contrat de juin arrivera à expiration le mois prochain
Pourquoi le stockage du pétrole est-il si important ?
En raison d'une crise mondiale de la santé publique, des pays du monde entier ont dû fermer leurs frontières, de nombreux gouvernements ayant imposé des mesures restrictives sur la vie quotidienne de milliards de personnes afin de ralentir la propagation du coronavirus.
Elle a créé un choc de demande extrême sur les marchés du pétrole, les espaces de stockage - tant à terre qu'en mer - se remplissant rapidement.
Aux États-Unis, la situation serait particulièrement grave, puisque les installations de stockage du principal point de livraison du pays à Cushing, en Oklahoma, devraient être remplies d’ici quelques semaines selon les estimations.
En effet, selon les analystes de Goldman Sachs (NYSE:GS), le centre de stockage de Cushing était rempli à 77% au 17 avril.
Les entreprises vont-elles envisager de fermer des puits ?
Le président Donald Trump a déclaré lundi qu'il envisagerait la possibilité d'empêcher les livraisons de pétrole brut d'Arabie Saoudite pour tenter d'alléger la pression sur les producteurs de schiste américains.
Trump a également réaffirmé son intention de compléter le stockage d'urgence du pétrole dans le pays.
Avec de nombreux réservoirs de pétrole qui se remplissent, le Département américain de l'énergie est actuellement en train de louer une partie des 77 millions de barils de pétrole disponibles dans la Réserve stratégique de pétrole, a rapporté Reuters mardi.
L'administration Trump avait initialement voulu acheter le pétrole brut, mais le Congrès n'a pas encore approuvé le financement.
En tout cas, si les réservoirs de stockage sont pleins et qu'il n'est pas possible de stocker le brut sur des pétroliers en mer, les analystes s'attendent à ce que les producteurs commencent à fermer les puits - un processus qui peut endommager physiquement les réservoirs et menace la perspective de relancer la production future.
De nouvelles réductions de production peuvent-elles régler le problème ?
Alors qu’il est clair que la demande de pétrole restera déprimée par la pandémie de coronavirus pendant encore plusieurs mois, le salut ne peut venir que du côté de l’offre pour le pétrole.
Même si l’Arabie Saoudite et la Russie peuvent voir des avantages à la déroute des prix du pétrole, comme expliqué ici, le pétrole négatif est également un problème pour ces pays dont le budget dépend beaucoup du pétrole.
Mais leurs options sont limitées, ayant déjà accepté la semaine dernière une série de réductions de production totalisant 9,7 millions de barils par jour au cours des deux prochains mois.
Cela pourrait mettre la pression sur Riyad, qui est blâmé par les américains pour avoir déclenché la guerre des prix face à la Russie, sous la pression de réduire encore plus que prévu sa production afin de ramener le marché vers l'équilibre.
D’après une note de mardi d’Helima Croft, responsable de la stratégie mondiale des matières premières à RBC Capital Markets, cela impliquerait que les Saoudiens devraient probablement réduire leur production en dessous du seuil de 8,5 millions de barils par jour qu'ils étaient auparavant réticents à franchir.
La Russie pourrait également faire preuve d’une meilleure volonté, alors que le président russe Vladimir Poutine semble maintenant personnellement investi dans les réductions de production après avoir été courtisé par la Maison Blanche et alors qu'il est confronté à des perspectives économiques difficiles chez lui.
Mais même si l'OPEP+ réduit sa production davantage que ce qui a été convenu la semaine dernière, il faudra du temps pour se débarrasser de l'énorme surabondance de pétrole.
En résumé, les turbulences ne sont pas prêtes de s’arrêter en ce qui concerne le pétrole…