Pourquoi Wall Street monte-t-il encore ?
On m’a demandé plusieurs fois, ces derniers jours, pourquoi Wall Street était aussi fort et haussier.
Pour répondre à cette question, il faut s’intéresser à la composition des indices. Prenons par exemple le Dow Jones qui réunit les 30 plus grosses capitalisations américaines. On pourrait alors imaginer que toutes les actions ont « à peu près » le même poids, donc le même impact sur l’évolution de l’indice.
Bien évidemment… ce n’est pas le cas.
Le Dow Jones aux mains de Goldman Sachs
Pour le Dow Jones, il y a une entreprise qui pèse plus de 8,30% du poids total : Goldman Sachs (NYSE:GS) (GS, oui je sais il est partout !).
En clair, une variation de GS pèsera huit fois la variation de General Electric (NYSE:GE), Coca-Cola (NYSE:KO) ou même Pfizer (NYSE:PFE) qui pèsent chacun environ 1% de l’indice.
Même Apple (NASDAQ:AAPL) ne rivalise pas avec la banque d’affaires et ne pèse « que » 4,5% de l’indice.
Comprenez avec ce tableau qu’il suffit que les neuf premières capitalisations (50% de l’indice) soient dans le vert pour tirer l’indice vers le haut rapidement.
Neuf valeurs sur 30, c’est gérable (comprenez : « manipulable »).
Comme vous le voyez dans le tableau ci-dessous, seules sept actions dépassent de plus de 2% la performance du Dow Jones, et seulement quatre ont une surperformance supérieure à 5% : Apple, Goldman Sachs, Boeing (NYSE:BA) et J.P.Morgan (JPM) représentent à eux seuls plus de 20% de l’indice et ont simplement ces valeurs qui tirent la totalité de la cote vers le haut.
Comprendre ce qui fait monter ces quatre valeurs permet donc de répondre en partie à la question.
Si Apple grimpe avec des résultats record et reste une sorte d’ovni dans le paysage boursier, les trois autres valeurs sont directement liées à la politique de Donald Trump. Goldman et JPM bénéficient d’une attente considérable de dérégulation de la part de la nouvelle administration.
Les promesses de reprendre le business as usual avec des « amis de la finance » aux commandes a suffi pour faire flamber les titres.
Goldman Sachs progresse de 20% depuis trois mois contre presque 16% pour J.P.Morgan. Boeing (NYSE:BA) profite des promesses de Trump d’un protectionnisme actif et d’une facilitation des exportations. Il a même évoqué une baisse du dollar.
Le S&P 500, même combat
Le S&P 500 regroupe les 500 plus grosses valeurs de la cote américaine.
Là, vous vous dites que ce n’est pas une poignée de titres qui vont pouvoir changer la donne…
Erreur : avez-vous déjà regardé la composante sectorielle du S&P ?
Le secteur financier pèse plus de 21% contre « seulement » 15% il y a moins d’un an. Sa part était tombée à 11% lors de la crise des subprime. S’il en fallait une, c’est bien la preuve que nous courons à grands pas dans une nouvelle bulle financière. Mieux : voici la progression du secteur financier (en bleu) sur un an comparé au S&P 500 (jaune).
Pour un S&P 500 qui gagne 22%, la finance progresse de 43%… Oui, près du double ! Attention, d’autres secteurs se portent bien : les technologies et les industriels profitent également du vent porteur du protectionnisme annoncé par Trump et se calent dans le sillage des financiers. L’immobilier et la consommation sont plus poussifs.
Alors, on vend ?
Certainement pas !
La patience est désormais de mise.
Malgré cette bulle financière et la fin des publications de résultats d’entreprises, la politique va reprendre la main sur l’évolution des marchés. Si des hausses sont encore possibles par défaut sur certains secteurs, mieux vaut désormais prendre un peu de recul et attendre les premières véritables décisions de Donald Trump en matière fiscale et économique.
Mais l’inquiétude majeure ne concerne peut-être pas les États-Unis eux-mêmes… mais plutôt une Europe fragilisée et sans véritable leader.
En effet, l’impôt sur les sociétés fortement décrié par les entrepreneurs américains devrait être abaissé à 20%.
Le rapatriement des dividendes et les taxes sur les importations (afin de doper la compétitivité américaine) seront également de véritables révolutions avec des répercussions mondiales. Et même si la déception pourrait être à la hauteur des attentes énormes sur les marchés financiers, si ces réformes devaient voir le jour, c’est peut-être l’explosion des marchés européens qu’il faudra surveiller.
Le simple rapatriement facilité des dividendes américains pourrait drainer 2 500 milliards de dollars hors des économies accueillant actuellement les investissements américains. De quoi largement secouer les places financières mondiales !
Finalement, Trump c’est leur président… mais ça pourrait surtout devenir notre problème.