Le vote sur l'ensemble du projet de budget 2016 en première lecture, riche en rebondissements, reste prévu mardi à l'Assemblée, mais le climat post-attentats va faire passer au second plan les débats sur les choix gouvernementaux.
Près d'un mois après l'adoption du volet "recettes" et de sa baisse d'impôt sur le revenu de plus de deux milliards d'euros par 277 voix contre 247, avec une "fronde" socialiste atténuée, il n'y a "pas d'inquiétudes" sur ce scrutin global, jugeait vendredi un député socialiste légitimiste, malgré "pas mal de soubresauts".
Au lendemain de la réunion du Parlement en Congrès pour écouter François Hollande, une large majorité des socialistes, la quasi totalité des radicaux de gauche, au moins la moitié des écologistes devraient voter pour, certains frondeurs socialistes et des écologistes s'abstenir encore. Les Républicains et l'Union des démocrates et indépendants confirmeront leur rejet, le Front de Gauche aussi, pour des raisons divergentes.
A quelques semaines d'élections régionales à risque, l'exécutif a répondu à plusieurs doléances de députés de la majorité par exemple pour alléger la fiscalité locale des retraités modestes, reporter la nouvelle architecture de la principale dotation de l'Etat aux collectivités (DGF), abandonner la révision du calcul de l'allocation adulte handicapé.
Malgré de fortes réserves de Matignon, de Bercy ou du président du groupe socialiste Bruno Le Roux, l'amendement porté par l'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault et Pierre-Alain Muet pour une dégressivité de la CSG au profit de bas salaires et soutenue par une bonne part de la gauche a ainsi passé le cap du vote.
"Le paquet fiscal 2016 porte l'empreinte de la majorité et il était grand temps", selon Christian Paul, l'un des animateurs des "frondeurs" socialistes, satisfait que le Parlement ait utilisé sa "marge de manoeuvre".
Le dernier budget de plein exercice du quinquennat de François Hollande, construit sur l'hypothèse d'une croissance de 1,5%, prévoit aussi la poursuite du plan d'économies (dont 8,6 milliards pour l'Etat et ses opérateurs ainsi que les collectivités locales) pour ramener le déficit à 3,3% du PIB.
Sur les dépenses, le gouvernement et les responsables socialistes n'ont cessé de mettre en avant un équilibre entre "responsabilité" et maintien des priorités, comme l'éducation, la sécurité ou la justice. L'accueil de 24.000 réfugiés sur deux ans s'est notamment traduit par le vote de moyens financiers ou humains accrus.
Et plusieurs annonces du président Hollande, en faveur des quartiers et zones rurales ou de l'immobilier et du BTP (assouplissement du prêt à taux zéro), ont été gravées dans le marbre.
- "Pré-électoral" -
Les élus de droite et du centre ont décrié des économies "en trompe-l'oeil" et un budget "pré-électoral", face à quoi la majorité leur a demandé dans quoi ils couperaient pour trouver les plus de 100 milliards d'euros d'économies évoquées par un Nicolas Sarkozy ou un François Fillon.
Le projet de loi de finances comprend aussi de nouvelles baisses de prélèvements pour les entreprises dans le cadre du Pacte de responsabilité, indispensable pour obtenir une baisse durable du chômage aux yeux de certains élus PS mais toujours décrié par d'autres socialistes, une partie des écologistes et le Front de Gauche.
Le texte engage par ailleurs une première étape vers la mise en place du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. "Sans doute l'une des plus grandes modernisations" de cet impôt "depuis des décennies", selon le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert, mais "pas une énorme réforme fiscale", pour l'ex-ministre Eric Woerth (LR).
Le projet de budget doit passer à partir de jeudi entre les mains du Sénat majoritairement à droite, qui en votera une version revue et corrigée, avant de revenir à l'Assemblée.
Le marathon budgétaire dans son ensemble, avec les projets de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 et de finances rectificative pour 2015, s'achèvera après les régionales.