par Samuel Shen et Kevin Yao
SHANGHAI/PEKIN (Reuters) - Les marchés boursiers chinois ont vécu mercredi une séance de montagnes russes, chutant en matinée pour terminer en nette hausse, des mouvements qui soulignent surtout le manque de confiance des investisseurs dans les efforts des autorités pour tenter de ramener le calme.
Les Bourses de Shenzhen et Shanghai ont perdu jusqu'à 3% en début de journée, portant à plus de 8% leur recul sur les deux derniers jours, mais une vague d'achats emmenée par des fonds publics leur a permis de terminer en hausse de plus de 1%.
L'indice CSI300 a terminé sur une progression de 1,6% et le Shanghai Composite a pris 1,2%.
Ce scénario commence à devenir familier aux investisseurs depuis que Pékin a mobilisé le mois dernier une "équipe nationale" d'institutions financières publiques et d'autorités de régulation pour mettre un terme à la chute des Bourses.
En fin de séance mercredi, plusieurs entreprises ont annoncé que des fonds publics avaient acheté une partie de leur capital, ce que les investisseurs ont interprété comme un signal des autorités de leur volonté de soutenir le marché. En début de soirée, une vingtaine de sociétés cotées avaient fait des annonces similaires.
Pour certains investisseurs, les marchés actions chinois ne fonctionnent désormais plus correctement, les spéculations sur l'action des institutions publiques provoquant régulièrement des variations marquées des cours et des retournements de tendance.
Les investisseurs à long terme restent pour l'instant à l'écart du marché, préférant se reporter sur les obligations et les marchés monétaires. "Nous conseillons de s'attacher avant une zone de turbulences", résume Tim Condon, responsable de la recherche Asie chez ING (AMS:ING) Bank à Singapour.
Le ministère du Commerce a fourni un nouveau motif d'inquiétude aux investisseurs mercredi en déclarant que les exportations pourraient continuer de baisser au cours des prochains mois après leur chute de 8,3% en juillet, la plus prononcée en quatre mois.
Sur les sept premiers mois de l'année, le commerce extérieur, exportations et importations confondues, a reculé de 7,2% par rapport à l'an dernier, alors que les autorités visent une hausse de 6% pour la totalité de 2015.
DOUTES SUR LA STABILISATION DU YUAN
"La possibilité que les exportations enregistrent certains mois une baisse en rythme annuel ne peut pas être exclue. Mais nous prévoyons toujours une croissance des exportations sur l'ensemble de l'année", a déclaré un porte-parole du ministère du Commerce lors d'un point de presse.
"Sur l'ensemble de l'année, le commerce extérieur sera confronté à une situation plus difficile que nous ne le pensions", a-t-il toutefois reconnu.
Le mois dernier, le ministère disait encore s'attendre à une amélioration des exportations au second semestre par rapport au premier.
Le rebond des marchés actions mercredi a débuté après des informations selon lesquelles la banque centrale allait offrir de nouveaux financements à moyen terme aux banques, en plus des 120 milliards de yuans (16,95 milliards d'euros) injectés mardi sur les marchés monétaires, la plus importante injection de liquidités dans le système financier depuis la semaine du 9 février.
La banque centrale a confirmé en fin de journée avoir prêté 110 milliards de yuans de liquidités à six mois à 14 institutions financières, dans le but affiché d'assurer une liquidité suffisante du système bancaire.
On explique de sources proches de la banque centrale que cette initiative visait à compenser la baisse de liquidité provoquée par la dévaluation du yuan la semaine dernière.
La perspective d'une poursuite de la baisse de la devise chinoise a de fait incité certains investisseurs à se reporter sur le dollar américain et elle risque de favoriser une augmentation des sorties de capitaux.
Illustrant la montée de l'anxiété chez les investisseurs, les taux d'intérêt du marché monétaire se sont orientés à la hausse mercredi en dépit des nouvelles injections de liquidités.
Les doutes persistent aussi sur l'évolution du yuan à court terme. Si les autorités assurent qu'il n'y a plus aucune raison que la monnaie se déprécie davantage (elle a perdu 3% face au dollar en huit jours), Bank of America Merrill Lynch a estimé mercredi qu'elles pourraient le laisser revenir à 6,50 pour un dollar d'ici la fin de l'année et 6,90 d'ici fin 2016, contre environ 6,40 aujourd'hui.
(avec Xiaoyi Shao à Pékin et Kazunori Takada à Shanghai, Marc Angrand pour le service français, édité par Dominique Rodriguez)