PARIS (Reuters) - La stratégie d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) pour les élections régionales de décembre crée des remous au sein de la formation, engluée dans des querelles internes et qui tient jusqu'à samedi ses journées d'été près de Lille.
Julien Bayou, porte-parole d'EELV, assure que "la ligne est très claire". "Pour les régionales, toutes les régions partent en autonomie", a-t-il dit jeudi sur RFI.
Mais des alliances avec la gauche de la gauche devraient émerger localement, ce que dénoncent depuis le début de la semaine plusieurs responsables écologistes.
La co-présidente du groupe à l'Assemblée nationale, Barbara Pompili, n'a pas exclu une scission du parti, sur fond de divisions sur la question d'un rapprochement avec l'exécutif socialiste, avec le Front de gauche, ou l'autonomie totale.
Le chef de file des sénateurs écologistes, Jean-Vincent Placé, a même menacé jeudi de quitter la formation, et confié au quotidien Le Monde son "ras-le-bol". Il dénonce les alliances en cours de conclusion avec le Front de gauche pour le premier tour dans deux régions où le Front national pourrait percer.
"La scission qui pouvait se produire après les régionales va arriver de façon certaine après le 12 septembre si le parti persévère dans cette stratégie dans le Nord-Pas-de-Calais", dit-il. "Ce vote aura forcément un impact national et chacun prendra ses responsabilités", ajoute-t-il, précisant avoir choisi son "camp" et être un "fidèle soutien du président de la République".
Dans une tribune publiée mercredi, à la veille de l'ouverture de leurs journées d'été, plusieurs écologistes, dont Jean-Vincent Placé, Barbara Pompili mais aussi le député François de Rugy, rappellent que le choix du parti était celui de l'autonomie au premier tour, avec une possibilité de discussions avec toute la gauche dès celui-ci "dans les régions où la probabilité que le FN emporte le scrutin est forte".
"Or, une sorte de fièvre estivale a saisi une partie d'EELV : outre la région Rhône-Alpes-Auvergne qui l'avait décidé en juin, dans trois régions les têtes de listes annoncent ou négocient des alliances avec tout ou partie du Front de gauche", regrettent-ils.
"FIÈVRE ESTIVALE"
Ce projet "risque non seulement de détruire l'écologie politique mais aussi de concourir au succès de l'extrême droite ou de la droite", jugent-ils.
Dans une lettre ouverte publiée sur le site du Parti de gauche, Eric Coquerel et Danielle Simonnet, coordinateurs du parti, proposent aux écologistes une rencontre au niveau national dans les prochains jours pour discuter des alliances.
"Les partis qui, comme les nôtres, ont en commun de refuser la politique du gouvernement ont une responsabilité première", écrivent-ils. "Le temps est venu d'une discussion nationale pour soutenir et développer (des) rassemblements dans un maximum de régions."
Mais la question des alliances divise au sein même du Parti de gauche. Dans le quotidien Sud-Ouest, Jean-Luc Mélenchon, ex-candidat à la présidentielle, déclare ainsi qu'il demandera à ses "amis" "de n'être dans aucune liste plutôt que de subir (une) annexion".
"Ils ont choisi de faire des listes autonomes. Mais dans six régions sur 13, ils s'unissent à nous", dit-il. "Ils disent une chose et en font une autre ! En plus, ils veulent avoir partout la tête de liste et compter le score pour EELV : c'est sectaire."
Le Premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, qui dit ne pas comprendre la "logique politique" des Verts, leur a lancé cette semaine un "appel pressant" à l'unité pour les régionales.
"La mélenchonisation de l'écologie n'est pas l'avenir de l'écologie", dit-il dans un entretien à Paris Match.
"On peut comprendre l'autonomie, mais là où il y a un risque de victoire du FN, comme en Paca ou en Nord-Pas-de-Calais-Picardie, c'est dramatique", ajoute-t-il. "L'émiettement au premier tour, c'est la certitude de ne pas être au second. C'est la chance offerte au FN de gagner des régions."
(Chine Labbé, avec Elizabeth Pineau, édité par Jean-Baptiste Vey)