L’Organisation mondiale du tourisme (OMT) a exhorté jeudi la communauté internationale à "soutenir" davantage les pays d'Afrique du nord confrontés à une grave crise du secteur, appelant notamment à une plus grande coopération pour "gagner la bataille" contre la menace jihadiste.
Secteur vital de l'économie, le tourisme traverse une grave crise dans des pays comme la Tunisie et l'Egypte, en raison des craintes d'attaques d'organisations telles que le groupe Etat islamique (EI).
"La communauté internationale tout entière a la responsabilité de se montrer solidaire. Nous ne laisserons jamais les forces obscures nous empêcher de voyager en Tunisie, en Egypte, ou n'importe où ailleurs", a déclaré à l'AFP Taleb Rifaï, secrétaire général de l'OMT, une agence onusienne.
"Tout le monde doit s'entraider afin de s'assurer qu'elles ne gagneront pas cette bataille. Et elles ne la gagneront pas", a-t-il ajouté.
Selon lui, "les moyens technologiques et les compétences humaines existent pour surmonter les menaces", et "nous devons accroître nos capacités à rendre les voyages plus sûrs". Mais, à ce jour, "nous ne coopérons pas assez au sein de la communauté internationale en terme de partage d'informations", a-t-il estimé.
M. Rifaï s'exprimait en marge de l'ouverture d'une conférence internationale organisée par l'OMT et le gouvernement tunisien à Gammarth, dans la banlieue de Tunis.
Ce rendez-vous intervient alors que ce pays a été frappé par deux attentats jihadistes, au musée du Bardo en mars et à Sousse en juin, qui ont fait 60 morts dont 59 touristes. Le secteur touristique, qui pèse près de 7% du PIB national et emploie quelque 400.000 personnes, est depuis à l'arrêt.
En Afrique du nord, le tourisme égyptien est lui aussi confronté à une chute vertigineuse des visites, dans la foulée du crash d'un avion russe dans le Sinaï le 31 octobre, l'hypothèse d'une bombe étant privilégiée.
- 'Excès' médiatique? -
"Nous ne devons pas laisser ces incidents nous intimider. (...) D'ici la fin de l'année, vous verrez que la tendance va s'inverser. Nous en sommes totalement convaincus", a encore clamé le secrétaire général de l'OMT.
Interrogée par l'AFP, la ministre tunisienne du Tourisme, Selma Rekki Elloumi, a pour sa part jugé que "ce qui s’est passé en Egypte aurait pu se passer n’importe où". "On sait maintenant que les risques existent dans le monde entier", a-t-elle avancé.
Elle a par ailleurs confirmé qu'au moins "70 hôtels" avaient dû fermer provisoirement leurs portes depuis septembre en Tunisie en raison de la chute de la fréquentation.
Les autorités tunisiennes estiment que l'industrie touristique va perdre plus de 500 millions de dollars et deux millions de nuitées d'hôtel cette année.
Notre tourisme est "dans une situation critique", a renchéri le président de la Fédération tunisienne des agences de voyages, Mohamed Ali Toumi, également présent à la conférence de Gammarth, dont le thème porte sur le "tourisme et les médias".
A ce sujet, M. Toumi a déploré des "excès" dans la couverture des attaques du Bardo et de Sousse. "Certains médias ont montré cet incident comme un événement quotidien en Tunisie" et cela "a eu un impact négatif sur l'image de la destination", a-t-il argué.
"Dans certains cas, peut-être y a-t-il eu des images qui n’auraient pas dû être filmées (...). Certaines images étaient un peu choquantes", a ajouté la ministre tunisienne.
Le secrétaire général de l'OMT a, lui, appelé à "être prudent avant de faire des reproches aux médias". "C'est vrai qu'ils ont une grande influence sur l'opinion mais dire qu'ils font partie du problème est une chose injuste", a-t-il fait valoir.