Les deux favoris à la succession du Premier ministre britannique David Cameron, Theresa May et Michael Gove ont annoncé qu'ils ne déclencheraient pas la procédure du Brexit avant fin 2016, voire en 2017, suscitant vendredi l'agacement de leurs partenaires européens.
Mais les conséquences économiques du vote des Britanniques pour la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne sont déjà palpables: le ministre des Finances George Osborne a annoncé qu'il faudrait sans doute abandonner l'objectif d'excédent budgétaire d'ici 2020 et la compagnie aérienne britannique EasyJet (LON:EZJ) a demandé un certificat de transporteur dans un pays de l'UE pour préserver un accès libre au ciel unique européen.
Décidé à garder la main s'il devenait chef du gouvernement, le ministre de la Justice Michael Gove a affirmé vendredi qu'il n'enclencherait sans doute pas la procédure de sortie de l'Union européenne cette année.
"Nous contrôlerons l'agenda, nous ne le ferons que lorsque nous serons prêts", a ajouté M. Gove, qui a fait campagne pour sortir de l'UE. "Nous avons besoin de discussions préliminaires", a-t-il encore dit.
Jeudi, la ministre de l'Intérieur Theresa May avait déclaré que si elle était désignée, elle n'enclencherait pas l'article 50 du Traité de Lisbonne du divorce avec Bruxelles, avant la fin de l'année.
- Revirement possible ? -
Dans le chaos politique qui règne au Royaume-Uni, certains observateurs se sont demandés si ce délai n'ouvrait pas la voie à un revirement et à un abandon du processus de séparation, alors que de leur côté les dirigeants européens appellent à l’activation la plus rapide possible de l'article 50 pour mettre fin à l'incertitude ambiante.
Le président français François Hollande n'a pas caché son agacement. Pour lui, la décision du Brexit "a été prise". "Elle ne peut pas être reportée ou elle ne peut pas être annulée", a-t-il martelé vendredi, jugeant qu'il était trop tard pour réfléchir aux avantages d'être dans l'UE.
Jeudi soir, la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström a elle répété qu'il n'y aurait pas de négociations avant une sortie officielle. "D'abord vous sortez, ensuite vous négociez", a-t-elle tranché sur la BBC.
Interrogé par l'AFP sur la possibilité de revenir sur la décision prise par une majorité de Britanniques, Simon Usherwood, du cercle de réflexion universitaire Changing Europe a déclaré que "tout est possible après la semaine qui vient de se passer mais, en étant réaliste, non".
Pour lui, la seule façon de revenir en arrière sur le Brexit "passerait par de nouvelles élections législatives". Une option qui n'a actuellement les faveurs d'aucun responsable politique britannique car "cela ne ferait que prolonger l'incertitude".
Theresa May, 59 ans, ralliée à David Cameron pour défendre un maintien dans l'UE, s'est présentée jeudi comme une candidate capable de ressouder le parti.
"Brexit signifie Brexit", a-t-elle déclaré. "La campagne a été menée, le vote a eu lieu, le taux de participation a été élevé et le peuple a rendu son verdict", a-t-elle ajouté pour dire aux "Brexiters" qu'elle comptait respecter leur choix.
Michael Gove, 48 ans, dont la candidature surprise a été perçue comme un coup de poignard dans le dos du chef de file des pro-Brexit Boris Johnson qui a jeté l'éponge, a lui promis d'apporter le changement pour lequel les Britanniques avaient voté.
Il s'est empressé d'ajouter que s'il est élu, il "mettrait fin à la libre-circulation" entre l'Europe et le pays afin de réduire l'immigration.
Mais le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a signifié vendredi que la libre circulation des travailleurs était "une liberté fondamentale de l'UE", qui "ne changerait pas", alors que David Cameron de son côté a suggéré que sa réforme serait "la clé" des relations post-Brexit entre le Royaume-Uni et l'UE.
- Theresa favorite -
Selon le quotidien conservateur Daily Telegraph, Mme May fait la course en tête pour l'heure, soutenue par plus de 60 députés conservateurs parmi lesquels neuf ministres.
"Theresa est la mieux placée pour mener notre sortie de l'UE", a ainsi déclaré le ministre de la Défense Michael Fallon, saluant "son bilan, son tempérament et son engagement à unir le parti et le pays".
Michael Gove, 48 ans, risque lui de pâtir de sa double trahison -d'abord de son ami David Cameron, puis de Boris Johnson- qui lui vaut nombre d'inimitiés au sein des députés conservateurs, dont 60% ont voté pour un maintien dans l'UE.
"Il y a une fosse profonde réservée en enfer pour les gens comme lui", a écrit sur Twitter le député Jack Berry.
Le ministre du Travail Stephen Crabb, l'ancien secrétaire d’État à la Défense Liam Fox et la secrétaire d'Etat à l'Energie Andrea Leadsom ont également déposé leurs candidatures pour succéder à David Cameron.
Les députés conservateurs doivent désormais se mettre d'accord pendant l'été pour désigner deux finalistes et les 150.000 membres du parti choisiront l'élu, qui sera intronisé le 9 septembre.