par Sudip Kar-Gupta et Tim Hepher
PARIS (Reuters) - Airbus (PA:AIR) a annoncé mardi avoir trouvé un accord de principe avec le parquet national financier (PNF) en France et avec des autorités similaires en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis dans le cadre d'enquêtes pour corruption présumée susceptibles de lui coûter plusieurs milliards d'euros.
L'avionneur européen déclare ne pas pouvoir en dire davantage pour des raisons juridiques, ces accords n'ayant pas encore été définitivement validés.
Mais le Financial Times rapportait lundi, citant des sources proches du dossier, qu'Airbus pourrait accepter de verser environ 3 milliards d'euros de pénalités pour mettre fin à ces enquêtes. Des spécialistes du secteur aérien avancent de leur côté un montant qui pourrait aller jusqu'à 5 milliards d'euros.
En 2017, le motoriste aéronautique Rolls-Royce (LON:RR) avait dû s'acquitter d'une amende de 809 millions de dollars (environ 735 millions d'euros) pour clore un litige avec les autorités américaine, britannique et brésilienne.
Airbus fait l'objet depuis des années d'enquêtes anticorruption sur sa façon de recourir à des intermédiaires pour ses ventes d'avions de ligne, une pratique qui n'a plus cours depuis 2014 selon ses dirigeants.
Le groupe a déjà dit par le passé coopérer aux enquêtes du PNF français, du SFO, le Serious Fraud Office britannique, et des autorités américaines.
Pour les analystes, la conclusion d'accords pour mettre fin à ces enquêtes est un développement positif et va permettre de tourner la page de ce scandale, évitant les perspectives de poursuites pénales qui auraient pu aboutir à une interdiction pour Airbus de participer à des appels d'offre publics aux Etats-Unis ou dans l'Union européenne.
Le titre, qui a gagné près de 3% dans les premiers échanges en Bourse de Paris, progressait de 1,10% à 14h20 quand le CAC 40 lui-même ne gagnait que 0,44%.
"Nous saluons la clôture de ces enquêtes du PNF et du SFO, même si cela a un coût. Les informations de presse avancent un montant de 3 milliards d'euros, dans la partie haute de ce que nous jugions probable", écrivent les analystes de Jefferies.
Cette opinion est partagée par les traders de Bank of America (NYSE:BAC), qui écrivent dans une note que ces accords enlèvent un "poids" pesant sur le titre en Bourse.
On ignore à ce stade si des personnes physiques, qui ne sont pas couvertes par cet accord de principe passé au niveau de l'entreprise, pourraient faire l'objet de poursuites individuelles.
Au coeur du dossier se trouve un système d'agents datant de plusieurs décennies, géré par une unité du siège maintenant dissoute, qui comptait environ 250 personnes réparties dans le monde entier et se traduisait par plusieurs centaines de millions d'euros d'honoraires par an, selon des personnes au fait de la question.
L'ouverture des enquêtes pour corruption a contribué à accélérer le renouvellement de la direction d'Airbus ces dernières années, le groupe paraissant soucieux de présenter de nouveaux visages aux autorités dans l'espoir de conclure plus facilement des accords amiables, selon des sources.
Reuters a ainsi rapporté en octobre 2018 que le conseil d'administration d'Airbus avait choisi de hâter le départ du directeur financier Harald Wilhelm - ce qui avait provoqué la démission surprise de celui-ci -, tout en reconnaissant qu'il avait été à l'origine de l'audit interne et de l'arrêt de cette pratique des intermédiaires.
Airbus s'est séparé en 2018 de plus de 100 salariés et a émis plus de 300 avertissements pour des raisons éthiques ou de respect des règles internes du groupe, ont dit à Reuters deux personnes ayant connaissance de ces données internes.
(Version française Nicolas Delame, Bertrand Boucey et Henri-Pierre André, édité par Jean-Michel Bélot)