Le rapport d'étape de la mission d'inspection sur le gaz de schiste, demandé par le gouvernement, est loin d'avoir calmé la fronde des opposants à l'extraction de cet hydrocarbure, qui jugent le texte "caricatural" et assurent qu'il ne fait que renforcer leur mobilisation.
"Ce rapport a été énormément influencé par l'industrie gazière qui veut se faire du fric", a déclaré à l'AFP le chef de file des opposants, José Bové.
"Le rouleau compresseur du ministère (...) dit: on a des réserves, on va pouvoir faire plus propre, la recherche va progresser, donc d'ici deux ou trois ans, on saura faire autrement. C'est le discours caricatural de l'industrie", a ajouté l'eurodéputé dont le fief aveyronnais est concerné au premier chef.
Le rapport, publié jeudi, estime que la France est "parmi les pays les plus prometteurs au niveau européen" en pétrole et gaz de schiste, et juge qu'il serait "dommageable, pour l'économie nationale et pour l'emploi, que notre pays aille jusqu'à s'interdire (...) de disposer d'une évaluation approfondie de la richesse potentielle".
La mission estime néanmoins qu'avant toute chose, il faudrait "lancer un programme de recherche scientifique" très encadré, et que "dans deux ou trois ans, l'expérience acquise (...) permettra de prendre des décisions rationnelles sur l'opportunité d'une exploitation".
La mission, qui a rédigé ce rapport d'étape, avait été mandatée en février par le gouvernement pour évaluer les "enjeux économiques, sociaux et environnementaux" des gaz de schiste, en réponse à la fronde croissante des élus locaux à l'exploration de cet hydrocarbure autorisée par l'ex-ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo en mars 2010.
Depuis, le gouvernement est allé bien plus loin, en soutenant une proposition de loi émanant du député UMP Christian Jacob, qui sera examinée en urgence le 10 mai, et qui prévoit l'interdiction de l'exploitation des gaz de schiste et l'abrogation des permis de prospection en cours.
Néanmoins, le rapport d'étape a réveillé les inquiétudes.
France Nature Environnement (FNE, 3.000 associations) a fait savoir que si elle s'attendait "à un rapport plutôt favorable à l'exploitation des gaz de schiste (...), elle ne s'attendait pas à un rapport aussi caricatural, quasiment sans nuance, où le seul objectif semble de rendre acceptables les gaz de schiste aux Français".
"Le but est évidemment de tenter d'influer sur la position des députés et sénateurs qui ont déposé par moins de 5 propositions de lois ces dernières semaines en vue d'interdire l'exploration et l'exploitation des gaz de schiste", écrit FNE dans un communiqué.
Pour Claude Pradal, maire de Villeneuve-de-Berg en Ardèche, où les industriels Schuepbach Energy et GDF Suez ont obtenu un permis d'exploration, ce rapport "donnera un nouveau souffle à la mobilisation".
Dans le rapport, "il y a quelques avancées, par exemple le fait qu'on ne fera rien sans en référer aux élus et aux collectivités", relève-t-il, mais "tout le rapport laisse présager que si ça ne se fait pas tout de suite, ça se fera tôt ou tard", a-t-il déclaré à l'AFP.
Estimant que le rapport "nous maintient dans l'idée qu'il faut rester vigilants" et maintenir la pression, José Bové a renouvelé son appel à aller manifester devant l'Assemblée nationale le 10 mai.