La majorité met le PS sous pression pour qu'il vote mercredi à l'Assemblée la "règle d'or" censé inscrire dans la Constitution la lutte contre les déficits, sur fond de crise de la dette en Europe qui menace toute la zone euro.
La ministre du Budget, Valérie Pécresse, a qualifié lundi au Sénat d'"irresponsable" l'attitude des socialistes parce qu'ils ont refusé de voter cette "règle d'or".
Derrière cette métaphore, se cache un projet de loi de réforme constitutionnelle dont le but politique est clair: maintenir dans la durée l'effort de lutte contre les déficits.
Comment ? Il ne s'agit pas d'inscrire dans la Constitution l'interdiction des déficits de fonctionnement, comme le voulait le Nouveau Centre en 2008, avant la crise, ni d'y graver des objectifs chiffrés, comme le retour du déficit à 3% du PIB en 2013 (engagement européen de la France).
De façon moins ambitieuse, et plus technique, le texte prévoit d'inscrire dans la Constitution des "lois cadres d'équilibre des finances publiques", "qui couvriront au moins trois années", a rappelé Mme Pécresse au Sénat.
Ces "lois-cadres" permettront à "chaque gouvernement de préciser le rythme du retour à l'équilibre, en s'engageant sur une date, ainsi que la nature et l'ampleur des efforts qu'il entend demander, chaque année, à la collectivité nationale pour y parvenir".
"Ce texte engage l'avenir. Je regrette que vous vous apprêtiez à voter contre la jeunesse de votre pays", avait lancé Valérie Pécresse, suscitant la colère des sénateurs PS.
Face à ces accusations de laxisme budgétaire, les candidats à la primaire du PS renvoient le gouvernement à sa propre responsabilité dans le creusement des déficits depuis 2007, dans un échange d'arguments qui pourrait durer tout au long de la campagne présidentielle.
"Aujourd'hui, voilà que Nicolas Sarkozy invente une règle d'or constitutionnelle pour les finances publiques, alors que son gouvernement a plombé les déficits par des cadeaux fiscaux aux plus favorisés et fait exploser la dette publique à un niveau record", a déclaré François Hollande. "Il est donc mal placé pour revêtir aujourd'hui la tenue de capitaine des pompiers".
Pour Martine Aubry, "on se moque un petit peu du monde, franchement".
"Quand on fait passer le déficit budgétaire de 40 à 140 milliards (...) quand on a doublé la dette de la France de 900 milliards à 1.800 milliards en 10 ans, on ne va pas expliquer qu'on va imposer à ses successeurs des règles", a-t-elle dit mardi, qualifiant le projet de loi de "tour de passe-passe".
Les députés PS voteront donc contre le projet de réforme constitutionnelle mercredi en seconde lecture à l'Assemblée.
S'ils maintiennent leur choix, la réforme constitutionnelle ne pourra pas être adoptée définitivement, puisqu'elle doit faire l'objet d'un vote à la majorité des 3/5e du Parlement réuni en Congrès à Versailles. Une majorité dont ne disposent pas les parlementaires UMP et leurs alliés.
La convocation d'une telle réunion du Congrès est une prérogative du chef de l'Etat. Le Premier ministre François Fillon s'y est dit favorable mardi.
"On dénoncera une manipulation, juste avant les élections et on boycottera", a prévenu un député PS rallié à Martine Aubry.
Le président de l'Assemblée, Bernard Accoyer (UMP), a dénoncé une "posture" de l'opposition, souhaitant qu'elle change d'avis. "Pour des raisons inexplicables, la gauche française se distingue ainsi radicalement de l'attitude plus responsable des autres gauches européennes", déplore-t-il.