Les places financières ont salué jeudi la décision historique de la Réserve fédérale américaine (Fed) de remonter ses taux pour la première fois depuis la crise, d'autant que cette décision s'accompagne d'un discours très mesuré.
Après des mois de spéculations, le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) a annoncé, à l'issue d'une réunion de deux jours, la première hausse depuis près de dix ans de ses taux, qui étaient presque nuls depuis 2008, une étape importante vers la normalisation de sa politique monétaire.
Après une ouverture en hausse, les Bourses européennes ont accéléré la cadence à la mi-journée, puis ont ralenti le rythme. Le CAC 40 a pris 1,14% à la clôture, le Dax à Francfort 2,57 et le FTSE à Londres 0,68%.
En Asie, Tokyo a évolué sur la même note, l'indice Nikkei affichant en clôture un gain de 1,6% après avoir déjà fortement augmenté la veille par anticipation. Shanghai et Hong Kong ont également fini dans le vert, terminant respectivement sur un bond de 1,81% et de 0,79%.
La Bourse de New York avait ouvert le bal mercredi soir, en progressant fortement, alors que la séance de jeudi était plus poussive.
- Discours accommodant -
"La hausse des taux aux États-Unis était inévitable", remarque Christopher Dembik, économiste chez Saxo Banque, la Fed "envoyant ainsi le message que l'économie américaine est en bonne santé et solide".
Non seulement les marchés avaient déjà largement pris en compte cette décision mais, comme beaucoup d'observateurs s'y attendaient, la banque centrale a pris un ton attentiste dans son communiqué, en mettant l'accent sur l'aspect "graduel" de ses futures actions.
La présidente de la Fed, Janet Yellen, a par la suite confirmé cette prudence en prévenant, lors d'une conférence de presse, qu'il ne fallait pas "surestimer" la signification de cette première mesure, et en s'engageant à ce que la politique monétaire américaine reste accommodante.
Pour le courtier Oddo Securities, le cycle de remontée sera même "hyper-graduel".
"Si tout va bien du côté de l'économie (plein-emploi, redressement de l'inflation), il faudrait en effet plus de trois ans pour normaliser la politique monétaire. Personne ne peut prétendre sérieusement se projeter avec confiance à un tel horizon", selon lui.
Les responsables de la Fed "ont eu tellement de peine à arriver à remonter les taux que la dernière chose qu'ils voulaient c'était faire peur", a estimé Gregori Volokhine, de Meeschaert Financial Services.
- Regain modéré du dollar -
Le marché de la dette s'est montré soulagé et la détente était de mise après la décision de la banque centrale américaine.
Le taux d'emprunt à 10 ans de l'Allemagne a reculé à la clôture à 0,599% contre 0,678% mercredi sur le marché secondaire, où s'échange la dette déjà émise. Le rendement de même maturité de la France a baissé à 0,936%.
Aux États-Unis, le taux d'emprunt à 10 ans baissait à 2,458% contre 2,296%, tout comme celui à 30 ans à 2,949% contre 3,004%. Le taux à deux ans reculait à 0,993% contre 1,003%.
Le ton plutôt attentiste adopté par la Fed a été de nature à freiner l'essor du dollar qui devrait a priori nettement profiter de la hausse des taux d'intérêt américains. Vers 17H00 GMT, l'euro valait 1,0807 dollar, contre 1,0911 dollar mercredi vers 22H00 GMT.
Les mouvements du dollar étaient aussi modestes envers les devises des pays émergents, pourtant théoriquement très vulnérables à un resserrement de politique de la Fed.
Dans la foulée de la Fed, l'Arabie saoudite, le Koweït et Bahreïn ont relevé leurs taux d'intérêt, malgré la baisse des cours du brut. L'Autorité monétaire de Hong Kong a également annoncé une mesure en ce sens.
In fine, la réaction des marchés reste mesurée comparé aux mouvements observés après les annonces de la Banque centrale européenne (BCE) début décembre: les Bourses avaient alors chuté et l'euro avait bondi. La BCE prend une voie opposée à la Fed en renforçant son soutien à l'économie mais ne l'a pas fait de façon assez marquée pour satisfaire les marchés.