A la veille du sommet climat de Paris, les PDG de Schneider Electric (PA:SCHN) et Solvay (BR:SOLB), qui coordonnent un engagement des grands groupes français en faveur du climat, appellent à l'abandon des "réflexes anciens" pour accélérer la lutte contre le changement climatique, dans un entretien à l'AFP.
Q: Qu'attendez-vous de ce sommet climat, axé sur le financement de la lutte contre le réchauffement climatique?
Jean-Pascal Tricoire (Schneider Electric): Tout le monde commence à être convaincu mais ce sont beaucoup de réflexes anciens qu'il faut changer. Dans un monde où les choses évoluent extrêmement vite, il faut s'assurer que les actions soient bien alignées.
Jean-Pierre Clamadieu (Solvay): On attend un message fort des politiques. Paris a été un moment de grand enthousiasme suivi par un certain nombre de difficultés de mise en oeuvre, puis une décision politique forte, celle des Etats-Unis disant +nous voulons sortir+ (de l'accord sur le climat). Mais dans les Etats, les villes et chez nos collègues américains, la mobilisation continue et voir demain autour du président de la République française un certain nombre d'acteurs politiques de premier plan exprimer leur volonté que la dynamique qui a été créée à Paris se poursuive, c'est un message fort dont on a besoin.
Q: Comment mobiliser les moyens financiers nécessaires?
M. Tricoire: J'attends beaucoup du monde de la finance. On a besoin de financements et il n'y a pas eu dans le passé suffisamment de discrimination entre les entreprises qui avaient un vrai engagement et celles qui n'en avaient pas. C'est cela qui fera une différence fondamentale parce qu'à la fin ce sont ceux qui investissent dans les entreprises qui en ont d'une certaine manière la direction.
M. Clamadieu: C'est en train de changer. Je suis au conseil d'administration d'Axa qui a pris sur le sujet des énergies fossiles, et en particulier du charbon, des positions très fortes (de désinvestissement). On a aujourd'hui un certain nombre d'entreprises françaises, qui disent +je vais appliquer les recommandations du TCFD+ (groupe de travail du G20 qui a travaillé sur la prise en compte du risque climatique par les entreprises) et on aura, dès février, les premiers rapports dans lesquels elles présenteront cette analyse de risque et de scénarios.
Q: Il y a deux ans, vous appeliez à un prix du carbone mondial. Il n'existe toujours pas.
M. Clamadieu: Il y a des signes très positifs. La Chine va démarrer dans les semaines qui viennent un marché du carbone deux fois plus important que celui du marché européen. La réforme du marché européen est aujourd'hui quasiment bouclée et il y a une dizaine d'initiatives dans le monde autour de cette problématique de prix du carbone. L'enjeu maintenant c'est de faire en sorte que ces marchés fonctionnent, qu'on ait des prix plus élevés, et qu'on aille progressivement vers une convergence. Le fait que les entreprises anticipent l'existence d'un prix externe du carbone en décidant de mettre en place un prix interne est un moyen de montrer qu'elles sont prêtes.
M. Tricoire: Toutes les décisions qu'on prend dans les entreprises ont une portée d'au moins dix ans, et même plutôt 50 quand on crée un laboratoire de R&D ou une nouvelle usine. Donc c'est absolument essentiel dans les choix d'aujourd'hui d'intégrer le coût carbone de nos décisions.