PARIS (Reuters) - Le service national universel, dont les modalités et le financement restent à déterminer, devrait disposer d'un budget spécifique dans le projet de loi de finances 2019, année de son expérimentation, a déclaré vendredi Geneviève Darrieussecq, qui juge "fantaisistes" les hypothèses budgétaires actuelles.
Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, ce "creuset national" serait dédié, selon le voeu du chef de l'Etat, aux filles et garçons de 18 à 21 ans sur une période d'un mois, soit 600.000 à 800.000 jeunes d'une classe d'âge.
Une mission d'évaluation des divers dispositifs existants pour la jeunesse s'achève sous l'égide des services du Premier ministre avant de laisser place à une commission qui sera nommée début novembre pour formuler au printemps 2018 des propositions sur le SNU dont le flou interroge dans les rangs des armées.
Le gouvernement a d'ores et déjà assuré que son financement ne pèserait pas sur le budget de la Défense, déjà sous tension, mais ne dit rien de son coût potentiel.
"Le chef de l'Etat s'est engagé à ce qu'il y ait une ligne budgétaire bien identifiée. Il n'y a pas de somme qui a été mise en avant", a dit la secrétaire d'Etat auprès de la ministre des Armées lors d'un point de presse.
"Il n'y a pas de programmation bien précise, de structuration. Sur le budget 2018, il n'y a pas de somme. J'imagine (...) qu'il y aura une ligne dans la loi de programmation des finances 2019", a-t-elle précisé.
Lors de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait estimé que le coût annuel du SNU (logement, transport, frais d’encadrement...) oscillerait entre deux milliards et trois milliards d’euros par an "en régime de croisière".
Dans un rapport d'information publié en juin dernier, la commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat s'alarmait du poids de ce dispositif, "un projet de société, pas une nécessité de la Défense", qu'il évaluait à quelque 30 milliards d'euros cinq ans.
"C'EST TRÈS LOURD"
Selon les auteurs du rapport, ce coût inclurait "12 à 17 milliards d’investissement initial en infrastructures et acquisitions foncières, et 2,5 à 3 milliards par an pour l’encadrement et le fonctionnement", avec la mobilisation de 16.000 à 18.000 encadrants.
"Fantaisiste", a répliqué Geneviève Darrieussecq, qui entend donner la primeur au "bon sens" et veut croire que point ne sera besoin de "moyens sophistiqués". "Si le coût budgétaire dépasse nos ambitions, il faudra retravailler le projet", a-t-elle dit.
On va vers une expérimentation en 2019, sans doute à l'échelle d'une région, indique-t-on dans l'entourage de la secrétaire d'Etat. "C'est très lourd en termes d'organisation et de budget", ajoute-t-on.
La Défense, mais aussi les ministères de l'Education nationale, de la Santé, seront concernés.
Le SNU devra en outre s'articuler avec le service militaire volontaire (SMV) voulu par François Hollande à la suite des attentats de janvier 2015 pour les jeunes de 18 à 25 ans. Un parcours d'insertion vers l'emploi de six à douze mois.
Jacques Chirac a supprimé en 1997 le service militaire obligatoire.
Outre les travaux de la commission, qui réunira représentants des ministères, parlementaires, membres des collectivités territoriales, etc., Geneviève Darrieussecq réfléchit à lancer "une grande consultation numérique" pour des appels à projets.
"Il faudra que les jeunes sortent du SNU en sachant ce qu'est l'engagement", a-t-elle souligné.
Selon les pistes tracées à grand trait par la secrétaire d'Etat, la vocation de ce service obligatoire serait d'inculquer aux jeunes "l'esprit de défense", l'esprit civique, de leur apprendre les gestes qui sauvent, "les gestes à faire et à ne pas faire" en cas de crise ou cataclysme naturel, de développer la prévention en matière numérique, mais aussi de vérifier les apprentissages basiques et l'état de santé de conscrits.
(Sophie Louet avec Elizabeth Pineau, édité par Jean-Michel Bélot)