par Guglielmo Mangiapane et Ashifa Kassam
MADRID/LAMPEDUSA, Italie (Reuters) - Le gouvernement espagnol a annoncé mardi qu'il envoyait un navire militaire afin de porter secours et escorter le bateau humanitaire Open Arms qui navigue au large de l'île de Lampedusa à laquelle le ministre italien de l'Intérieur refuse l'accès depuis 19 jours.
"L'Audaz va appareiller cet après-midi à 17h00 et il naviguera pendant trois jours jusqu'à Lampedusa où il prendra en charge les personnes à bord de l'Open Arms et escortera le navire jusqu'au port de Palma de Majorque", a déclaré le gouvernement du socialiste Pedro Sanchez.
"Le gouvernement considère que cela est la solution la plus adéquate afin de trouver une réponse à l'urgence humanitaire à bord de l'Open Arms cette semaine", a ajouté le gouvernement espagnol.
L'objectif est de procéder à un transfert de la plupart des migrants à bord de l'Audaz et d'accompagner l'Open Arms avec le reste des réfugiés, a expliqué un responsable gouvernemental.
L'Open Arms a dit ne pas avoir encore été informé de cette décision.
L'ONG qui gère le navire humanitaire a déclaré mardi que la situation avec une centaine de personnes à bord était "hors de contrôle" après près de trois semaines d'attente pour pouvoir accoster à Lampedusa.
Une dizaine de migrants se sont jetés par dessus bord mardi matin pour tenter de rallier l'île italienne à la nage, a annoncé l'organisation humanitaire espagnole parlant d'une situation "désespérée".
"Neuf personnes se sont jetées à l'eau pour essayer désespérément d'atteindre la côte de Lampedusa. Nos sauveteurs et les gardes-côtes italiens tentent de les secourir. La situation est incontrôlable", déplore Open Arms sur Twitter (NYSE:TWTR).
Des gardes-côtes italiens sont intervenus pour porter secours aux naufragés, a rapporté un journaliste de Reuters.
SALVINI ESTIME QUE LA FERMETÉ A PAYÉ
L'ONG espagnole avait auparavant signalé qu'un autre passager s'était jeté par dessus bord, vidéo à l'appui. On y voit un bateau des garde-côtes italiens lui barrer la route.
"Jour 19: une nuit de panique et un homme à la mer. La nuit a commencé par une évacuation médicale urgente et, ce matin, un homme a sauté à l'eau pour essayer d'atteindre la terre ferme (...) La situation est désespérée", a-t-elle tweeté.
L’homme en question, qui est de nationalité syrienne, a finalement été recueilli par les autorités italiennes, a précisé ensuite une porte-parole d'Open Arms.
Matteo Salvini a estimé mardi que l'ONG exagérait les problèmes à bord du navire humanitaire. Il a déclaré que huit migrants avaient été conduits à terre lundi soir pour des raisons médicales et que seulement deux avaient des ennuis de santé.
"ONG espagnole, bateau espagnol, port espagnol : la cohérence et la détermination de l'Italie ont payé. Nous ne sommes plus le camp de réfugiés de l'Europe", a-t-il déclaré.
Le ministre italien des Transports Danilo Toninelli a salué la décision des autorités espagnoles et a souhaité qu'à l'avenir elles empêchent les activités de l'Open Arms.
Madrid avait proposé dimanche à l'équipage de gagner le port espagnol le plus proche pour y débarquer, mais l'ONG avait jugé que le voyage mettrait "en danger l'intégrité et la sécurité des passagers secourus et de l'équipage".
Le gouvernement espagnol a en outre accusé lundi les autorités italiennes de violer le droit de la mer en s'opposant l'accostage du navire, malgré l'accord de répartition de ses passagers que Rome a conclu la semaine dernière avec l'Espagne, la France, l'Allemagne, le Portugal, la Roumanie et le Luxembourg.
(Belén Carreño et Guglielmo Mangiapane avec Jose Elías Rodríguez, Ashifa Kassam, Elena Rodriguez et Joan Faus à Madrid, Stephen Jewkes à Milan, Jean-Philippe Lefief pour le service français)