par Philip Blenkinsop et Robert-Jan Bartunek
BRUXELLES (Reuters) - Le "livre blanc" britannique sur les futures relations entre le Royaume-Uni et l'Union européenne contient des éléments constructifs mais de nombreuses questions restent toujours sans réponses, a déclaré vendredi Michel Barnier.
Le négociateur de l'UE, qui a rencontré jeudi le nouveau ministre britannique chargé du Brexit, Dominic Raab, a souligné qu'il ne pouvait y avoir de progrès sur les relations futures entre Londres et les Vingt-Sept tant que les modalités de sortie de la Grande-Bretagne de l'UE n'auront pas été fixées, notamment en ce qui concerne la frontière entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande.
"Il y a plusieurs éléments dans ce 'livre blanc' qui ouvrent la voie à une discussion constructive" sur les futures relations, a dit Barnier lors d'une conférence de presse à Bruxelles, à l'issue d'une réunion des ministres des Affaires étrangères des pays de l'UE.
Le gouvernement britannique, a-t-il poursuivi, partage le souhait de l'Union de conserver des relations commerciales ambitieuses, d'avoir des règles de concurrence équitables et un partenariat en matière de sécurité.
Toutefois, le négociateur européen a précisé avoir posé de nombreuses questions aux Britanniques, pour savoir si les propositions du "livre blanc" sont réalisables et si elles ne risquent pas d'entraîner des lourdeurs bureaucratiques difficilement supportables.
"NON À PLUS DE BUREAUCRATIE"
"Je dirai simplement que le Brexit ne peut pas être et ne sera pas une justification pour imposer encore plus de bureaucratie", a insisté Michel Barnier.
Il a noté qu'il restait seulement treize semaines d'ici le Conseil européen qui doit finaliser l'accord du Brexit.
A 80%, a-t-il dit, cet accord est déjà au point mais il reste à régler la délicate question de la frontière irlandaise.
En visite vendredi à Belfast, en Irlande du Nord, la Première ministre britannique Theresa May a réclamé un nouvel accord destiné à éviter le rétablissement d'une frontière physique entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande.
Elle a souligné qu'il serait presque "inacceptable" d'imaginer le rétablissement d'une frontière physique, mais a rejeté les idées avancées jusqu'ici par l'UE, qu'elle juge "inapplicables".
Le "livre blanc" de Theresa May sur le Brexit - document politique qui a précipité notamment la démission du secrétaire au Foreign Office Boris Johnson - propose de négocier des liens commerciaux les plus étroits possibles avec l'UE, afin de préserver les entreprises britanniques, et d'honorer l'engagement d'éviter de rétablir une "frontière dure", avec des infrastructures douanières, à la frontière avec l'Irlande.
LA QUESTION DE LA FRONTIÈRE EN IRLANDE
Les 500 km de frontière sont pour ainsi dire devenus invisibles depuis que les postes de contrôle militaires ont été retirés après la conclusion de l'accord du Vendredi-Saint, en 1998, qui a mis fin à une trentaine d'années de violences en Irlande du Nord.
La classe politique nord-irlandaise avertit que le rétablissement d'infrastructures à la frontière, s'il advient, risque de provoquer la colère des nationalistes irlandais qui aspirent à une unification avec la République d'Irlande.
Theresa May rejette la solution en forme de "filet de sécurité", proposée par l'Union européenne, en vertu de laquelle l'Irlande du Nord resterait étroitement alignée sur le marché unique de l'UE et sur l'union douanière. A l'appui de son refus, la Première ministre estime que cette solution créerait une frontière de fait entre l'Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni.
Le ministre irlandais des Affaires étrangères, Simon Coveney, a reconnu que la réaction des capitales européennes au livre blanc britannique était mitigée mais qu'il y avait un consensus pour que ce document serve de base aux négociations.
(Avec Graham Fahy; Eric Faye, Nicolas Delame et Guy Kerivel pour le service français)