par Nidal al-Mughrabi et Dan Williams
GAZA/JERUSALEM (Reuters) - Une puissante explosion dans une aire de jeux du camp de réfugiés d'Al Chati, dans le nord de la bande de Gaza, a coûté la vie lundi à huit enfants et deux adultes, réduisant le mince espoir de voir se prolonger une trêve informelle dans l'enclave palestinienne à l'occasion de la fête musulmane de l'Aïd al Fitr.
Les habitants ont déclaré que l'explosion, qui a également fait une quarantaine de blessés, était due à une frappe aérienne israélienne, mais l'Etat hébreu a démenti, déclarant qu'il s'agissait d'une roquette tirée par erreur par le Hamas.
Des médias israéliens ont également fait état du décès de quatre Israéliens dans un tir de mortier tiré à partir de la bande de Gaza vers le sud d'Israël, mais l'armée n'a pas fait de commentaire.
La télévision israélienne a par ailleurs rapporté que des hommes armés palestiniens avaient pénétré dans un village proche de la frontière avant d'être repoussés par Tsahal. Cinq Palestiniens ont été tués, a-t-elle rapporté alors que le Hamas affirme que son commando a tué dix soldats israéliens avant de repartir sans encombre vers la bande de Gaza.
Avant cela, au 21e jour d'un conflit dont le bilan dépasse les 1.000 morts, en grande majorité palestiniens, un porte-parole de l'armée israélienne avait déclaré que les troupes n'ouvriraient le feu que pour riposter à des attaques, et ce pour une période "illimitée". Elle a par la suite accusé les Palestiniens d'avoir tiré au moins 17 roquettes dans la journée.
Le Hamas, maître de la bande de Gaza depuis 2007, avait souhaité dimanche une trêve de 24 heures à l'occasion de l'Aïd al Fitr, qui marque lundi la fin du ramadan.
Israël a semblé rejeter cette proposition, après avoir renoncé à étendre son propre cessez-le-feu mis en place samedi pendant douze heures, en raison des tirs de roquettes palestiniens. Mais le calme s'est progressivement installé sur le territoire côtier au cours de la nuit, malgré quelques tirs sporadiques, jusqu'à la série d'explosions de l'après-midi.
EXPLOSION A L'HÔPITAL DE CHIFA
Outre les enfants tués dans le camp d'Al Chati, une explosion a ébranlé l'hôpital de Chifa, principal hôpital de la bande de Gaza, sans faire de victimes. Israël, qui avait précédemment accusé le Hamas de cacher des militants dans l'établissement, a imputé l'explosion à une erreur de tir des combattants palestiniens.
Les pressions internationales se sont accentuées dimanche sur le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour qu'il accepte un cessez-le-feu immédiat qui permettrait de soulager la situation des 1,8 million d'habitants de l'enclave, suivi de négociations sur une cessation plus durable des hostilités.
Israël, qui a lancé son opération "Bordure protectrice" le 8 juillet afin de mettre fin aux tirs de roquettes sur son territoire et de détruire les tunnels d'infiltration des combattants palestiniens vers Israël, semble préférer un arrêt informel des combats plutôt qu'un accord qui préserverait l'arsenal du Hamas.
L'Etat hébreu redoute notamment que les islamistes profitent de négociations sous l'égide de pays alliés comme le Qatar ou la Turquie pour obtenir la levée du blocus israélo-égyptien sur la bande de Gaza.
Le numéro deux du Djihad islamique, autre groupe armé palestinien, a déclaré être "à quelques jours de la fin de la bataille". "Nous n'accepterons rien d'autre que la fin du blocus", a dit Zeyad al Nakhala à la radio Al Qods.
L'OPINION ISRAÉLIENNE SOUTIENT L'ARMÉE
Répondant à une déclaration du Conseil de sécurité qui a appelé, dans la nuit de dimanche à lundi, à une nouvelle pause humanitaire après l'Aïd al Fitr, Benjamin Netanyahu a accusé les Quinze de s'aligner sur les intérêts du Hamas.
"Cette déclaration n'offre aucune réponse aux besoins de sécurité d'Israël - parmi lesquels la démilitarisation de la bande de Gaza", a-t-il dit, cité par ses services. "Israël a accepté trois propositions de l'Onu pour des trêves humanitaires et le Hamas les a toutes violées."
A New York, Ban Ki-moon a déploré le manque de volonté politique des dirigeants des deux parties de résoudre le conflit, les exhortant à "faire preuve d'humanité".
Barack Obama a exhorté dimanche au téléphone le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à un arrêt sans conditions des hostilités, ajoutant que "toute solution durable(...)doit se faire avec l'assurance que les groupes terroristes seront désarmés et Gaza démilitarisée".
Le président américain souhaite une trêve dans les mêmes termes que celle, négociée par l'Egypte, qui a mis fin au dernier conflit dans le territoire en novembre 2012, et soutient la "coordination régionale et internationale pour mettre fin aux hostilités", a déclaré la Maison blanche.
Des responsables israéliens, cités par les médias, s'en sont pris à un projet d'accord attribué au secrétaire d'Etat américain John Kerry, le jugeant trop accommodant pour le Hamas.
En Israël, 87% des personnes interrogées se déclarent favorables à la poursuite des opérations militaires jusqu'au renversement du Hamas, selon un sondage diffusé à la télévision.
Le bilan de l'opération "Bordure protectrice" s'élève à 1.054 morts côté palestinien, majoritairement des civils parmi lesquels de nombreux enfants, selon les responsables de Gaza. Israël a perdu 43 soldats et trois civils - deux Israéliens et un travailleur immigré thaïlandais - ont été tués par des tirs de roquettes.
Lors de la précédente offensive terrestre sur la bande de Gaza, "Plomb durci", pendant l'hiver 2008-2009, au cours de laquelle avaient péri 1.400 Palestiniens et 13 Israéliens, les hostilités avaient cessé après une trêve unilatérale mise en oeuvre par Israël, que le Hamas avait par la suite acceptée.
D'après l'agence onusienne UNRWA, 167.000 personnes environ ont trouvé refuge dans les écoles et bâtiments qu'elle gère dans la bande de Gaza, à la suite des appels répétés lancés par l'armée israélienne à la population palestinienne pour qu'elle évacue des quartiers entiers.
(Eric Faye, Agathe Machecourt et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)