Le Smic passera au 1er janvier de 8,86 à 9 euros bruts l'heure, en application de la revalorisation minimum légale et sans "coup de pouce" du gouvernement au nom de la défense de l'emploi, alors que les syndicats dénoncent une hausse équivalente à "une demie-baguette par jour".
"Je proposerai demain en Conseil des ministres de revaloriser le Smic de 1,6% au 1er janvier 2011 conformément aux dispositions légales. Le Smic horaire brut passera donc à 9 euros, son montant mensuel étant dès lors de 1.365 euros" bruts, a déclaré le ministre du Travail Xavier Bertrand aux partenaires sociaux.
Cela représente par mois une hausse nette de l'ordre de 17 euros (soit environ 1.073 euros nets par mois) et "par jour 55 centimes, soit la valeur d'une demie-baguette de pain pour les salariés", s'est indignée Michèle Chay (CGT) après la réunion de la Commission nationale de la négociation collective.
Environ 2,3 millions de Français, soit un salarié sur dix, est payé au Smic, fixé depuis début 2010 à 8,86 euros de l'heure.
Depuis l'élection de Nicolas Sarkozy à la présidence en 2007, aucun "coup de pouce" n'a été donné au Smic lors des différentes revalorisations.
"Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de coup de pouce qu'il n'y a pas d'augmentation du Smic", a fait valoir M. Bertrand.
Jugeant que "la politique récurrente des coups de pouce peut avoir pour effet d'évincer de l'emploi les plus fragiles", il a réaffirmé que sa "priorité" dans la fixation du Smic était la baisse du chômage, car "l'emploi, c'est créer des richesses, augmenter les revenus du travail et développer le pouvoir d'achat".
Les Smicards travaillent surtout dans les petites entreprises et dans les secteurs du commerce et des services comme l'hôtellerie et la restauration. Les salariés à temps partiel, dont les femmes, sont surreprésentés.
Les cinq experts chargés de se prononcer avaient déconseillé la semaine dernière tout coup de pouce, estimant que la hausse du Smic pouvait "améliorer la rémunération des personnes en emploi" mais éloignerait du marché du travail les plus fragiles.
Pour le Medef, Benoît Roger-Vasselin a considéré qu'"il ne faut pas confondre le Smic avec une politique de redistribution, tout à fait légitime mais elle est de la responsabilité de l'Etat et pas des entreprises".
En revanche, la décision du gouvernement a été unanimement dénoncée par les syndicats.
Pour la CFDT, qui a demandé "exceptionnellement" un coup de pouce "pas excessif" de 0,5%, "les ménages notamment à bas salaires subissent des dépenses incompressibles et le pouvoir d'achat et la consommation sont centraux alors que la France n'est pas encore sortie de la crise", a expliqué Laurence Laigo.
La CGT, qui voulait un Smic à 1.600 euros bruts par mois, s'est exclamée: "c'est Noël pour les patrons", et a jugé que "le gouvernement persiste à ne pas prendre en compte les besoins des salariés" alors que "la crise n'est pourtant pas la même pour tout le monde" au vu des bénéfices du CAC 40.
"L'absence d'augmentation significative du Smic pour la cinquième année est une déception pour les salariés dans un contexte de crise", a renchéri Marie-Alice Medeuf-Andrieu (F0).
Alors que "tous les prix augmentent (logement, SNCF, assurances) et le Smic n'augmente que de 1,6%, quasiment rien", a lancé Gabrielle Simon (CFTC), regrettant qu'"on trouve de l'argent pour les groupes financiers, pas pour les Smicards".
"Le gouvernement pouvait mieux faire", a enfin commenté Véronique Roche (CFE-CGC).