Le patronat a dressé mardi un tableau extrêmement sombre de la crise de la zone euro, avec une double intention: appeler à un sursaut européen mais aussi inciter le nouveau gouvernement à épargner des entreprises confrontées à une situation "très angoissante".
La présidente du Medef n'y est pas allée par quatre chemins, lors de sa conférence de presse mensuelle à Paris. "Nous avons tous le sentiment aujourd'hui de vivre un moment grave, historique, un moment de vérité", a d'emblée lancé Laurence Parisot, en scandant lentement ses mots.
Première source d'inquiétude: "l'avenir de la zone euro".
Fraîchement rentrée du B20, le forum des patronats des pays riches et émergents du G20 qui se tenait au Mexique, elle a assuré que, "parmi les chefs d'entreprises français, européens et aussi non européens, l'angoisse est palpable et notre inquiétude est immense".
Selon Mme Parisot, qui avait déjà plaidé pour des "Etats-Unis d'Europe", "nous avons besoin de faire un pas de géant européen" vers une "plus grande intégration".
Citant divers instruments en débat pour faire face à la crise, elle a balayé "toutes ces considérations techniques" devenues "secondaires face au besoin d'une nouvelle gouvernance plus démocratique, plus simple, plus lisible, plus accessible".
"donner un élan"
"Nous demandons aujourd'hui aux responsables politiques européens, quel que soit leur bord, de se comporter en hommes d'Etat et de donner un élan", a déclaré la patronne des patrons, les appelant à "sortir des schémas classiques".
Selon elle, l'Europe a "besoin d'une voix unique", "c'est cela qui nous permettra de peser, de contrebalancer les puissances colossales des autres grandes régions du monde". Mme Parisot s'est dite "persuadée" que l'Elysée a "conscience de la gravité de la situation" et a souligné que le président François Hollande était "un Européen convaincu".
Mais "tout le monde est convaincu que ça dépend vraiment du couple franco-allemand", "il faut vraiment que quelque chose de déterminant se passe à ce niveau-là", a-t-elle insisté, à dix jours d'un sommet crucial de l'Union européenne.
Mais la présidente du Medef a aussi profité de ce début de quinquennat pour marteler la ligne patronale face aux projets gouvernementaux. Et, pour cela, elle a redit à quel point la situation économique était à ses yeux dégradée.
Alors que l'Insee a fait état au même moment d'une nouvelle détérioration du moral des industriels, Mme Parisot a dit n'avoir "même plus besoin de regarder les indicateurs macroéconomiques".
"désarroi"
"De partout, nous avons les mêmes informations qui nous remontent", a-t-elle assuré, en égrenant une litanie de mauvaises nouvelles: "Un effondrement des marges, une chute des carnets de commande, des tensions à nouveau extrêmes sur les trésoreries, des incertitudes telles que tous les grands projets sont mis en stand-by, des projets d'embauche qui sont gelés, des projets d'investissement qui sont au mieux suspendus, mais bien souvent totalement annulés."
"Nous sommes en proie à une forme de désarroi" et, "au fond, nous avons peur d'un étranglement programmé", a-t-elle encore ajouté.
"Compte tenu de la situation très angoissante dans laquelle nous avons le sentiment d'être, il faut aussi que le nouveau gouvernement, le nouveau Parlement prennent bien la mesure des circonstances et pensent leurs décisions en fonction de cela", a-t-elle prévenu, exprimant "une inquiétude" à ce sujet.
Mme Parisot a donc promis d'être "très vigilante". Et pour joindre le geste à la parole, elle a distribué au gouvernement ses premiers mauvais points, sur le coup de pouce au Smic et, surtout, sur le projet de taxe sur les dividendes distribués aux actionnaires.