"En grève pour notre survie": des employés de fast-food se sont à nouveau mobilisés jeudi aux Etats-Unis pour réclamer une hausse de leur rémunération au moment où le débat sur le salaire minimum refait surface dans le pays.
"Je galère et je dépends toujours de l'aide du gouvernement pour pouvoir prendre soin de moi-même et de ma famille", déclare Shementia Butler, 33 ans, employée chez McDonald's à Washington et mère de deux enfants.
"Mes managers me disent: +Si ça ne te va pas, démissionne+", affirme la jeune femme qui gagne environ 800 dollars par mois et doit payer un loyer de 1.000 dollars.
Comme elle, des salariés ont défilé jeudi dans plusieurs grandes villes américaines pour réclamer une rémunération horaire de 15 dollars (11,03 euros) alors que le salaire minimum appliqué dans de nombreux fast-food est de 7,25 dollars. Après de premières mobilisations fin 2012 et en août, des actions ont eu lieu jeudi dans une centaine de villes, selon les organisateurs.
A New York, point de départ de la mobilisation, des manifestants ont brièvement occupé un McDonald's à Manhattan tandis qu'une centaine de personnes se sont réunies devant un restaurant Wendy's dans le quartier de Brooklyn. "7,25 de l'heure, ce n'est rien pour une ville aussi chère. La nourriture, les transports... tout augmente", lance Alama Sanchez, une caissière de 21 ans.
Le maire élu de la ville leur a apporté un vibrant soutien. "L'industrie du fast food génère des milliards tous les ans mais refuse de payer suffisamment ses employés", a déclaré dans un communiqué Bill de Blasio, le démocrate qui prendra ses fonctions en janvier.
Réunis dans le quartier des musées, à quelques encablures du Congrès, les manifestants de Washington en ont, eux, appelé au président américain en scandant "Obama, écoute-nous! Nous sommes en lutte" et en brandissant des affiches où le slogan "Hope" ("espoir") de sa dernière campagne présidentielle a été remplacé par "Help" ("à l'aide!").
"Nous sommes la colonne vertébrale de ce pays. Nous sommes ceux qui permettent aux entreprises de fonctionner tous les jours", assure Anthony Watkins, un Afro-Américain longiligne de 23 ans salarié de Wendy's.
A ses côtés, Delano Wingfield se lamente. Salarié à mi-temps dans deux fast-food, ce jeune homme de 22 ans doit encore demander de l'argent à ses parents pour payer son loyer. "Ca ne devrait pas se passer comme ça", souffle-t-il.
"Opération de communication"
Selon une récente étude de l'Université de l'Illinois, plus de la moitié des familles vivant sur des salaires de l'industrie du fast-food doivent faire appel à l'aide publique pour survivre.
"On travaille dur mais on n'a tout simplement pas assez pour vivre", ajoute Yaya Badji, arrivé du Sénégal il y a un an et encore "surpris" par le niveau des salaires.
Peu fréquentes aux Etats-Unis, ces mobilisations ont trouvé un certain écho auprès de l'administration Obama, qui veut porter le salaire minimum à 9 dollars mais se heurte à l'opposition des républicains au Congrès.
Mercredi, le président américain a encore affirmé qu'il était "grand temps" d'augmenter le salaire minimum, assurant qu'il était au même niveau qu'au lendemain de la seconde guerre mondiale.
Les manifestants réclament toutefois davantage que 9 dollars en assurant que les finances publiques américaines en bénéficieront. "A 15 dollars, nous n'aurons plus besoin d'aide de l'Etat. Si l'administration ne veut pas avoir à s'occuper de nous, nous devons gagner assez d'argent pour survivre", assure Shementia Butler.
Le secteur de la restauration continue, lui, de défendre ses pratiques. Contacté par l'AFP, le groupe McDonald's assure "offrir des salaires et des prestations compétitives" à ses employés et récuse l'appellation de "grève" en soulignant que ses restaurants restent ouverts.
L'association nationale de la restauration a, elle, qualifié la mobilisation "d'opération de communication" montée par les syndicats et assuré qu'une hausse du salaire minimum à 15 dollars "conduirait à réduire le nombre d'emplois créés" par le secteur, a indiqué à l'AFP son vice-président Scott DeFife.