Le rapprochement entre Banque Populaire et Caisse d'Epargne doit être entériné mardi par le Parlement, mais l'opposition de certains syndicats, inquiets pour l'emploi, pourrait retarder cette fusion qui donnera naissance au deuxième groupe bancaire français.
Après l'Assemblée à la mi-mai, le Sénat devrait adopter mardi le projet de loi qui institue un "organe central" commun aux deux banques.
L'Autorité de la concurrence, qui doit se prononcer de son côté d'ici la fin du mois, devrait rendre une décision favorable même si des fermetures ponctuelles d'agences pourraient être exigées, notamment dans les DOM-TOM.
Accélérée par la crise financière, la fusion entre ces deux banques de détail était en germe depuis la création fin 2006 de Natixis, leur filiale commune dans la banque d'investissement.
Comme les négociations patinaient, l'Elysée a pris le dossier en main, imposant fin février son secrétaire général adjoint, François Pérol, à la tête du futur groupe. Ce dernier, dont la nomination a suscité une vive polémique, est visé par une enquête préliminaire du parquet de Paris pour prise illégale d'intérêts.
A cette épée de Damoclès judiciaire s'ajoute désormais la menace de certains syndicats de bloquer la fusion des deux banques, qui emploient à elles deux 110.000 salariés. Les élus syndicaux du comité de groupe Caisse d'Epargne ont ainsi fait savoir jeudi qu'ils ne disposaient pas des informations suffisantes, notamment en matière d'emploi, pour rendre un "avis éclairé" sur la fusion.
Qu'il soit positif ou négatif, l'avis de chacun des comités d'entreprise (CE) de chaque Caisse d'Epargne et Banque Populaire régionale (soit 37 au total) est pourtant indispensable pour mener à bien la fusion.
Or, si les CE ne se prononcent pas d'ici le 20 juin, la fusion pourrait être retardée de plusieurs mois pour des raisons comptables. Résolus à entraver autant que possible le processus, les comités d'entreprise de trois des 17 Caisses d'Epargne régionales ont même décidé d'intenter des recours en justice pour défaut d'information.
Les craintes des syndicats pour l'emploi se fondent sur deux rapports qu'ils ont commandés à des cabinets d'experts indépendants.
Tandis que le rapport Secafi (côté Banque Populaire) souligne l'absence, pour les personnels, d'une "vision plus précise de leur devenir individuel", le rapport Sacef (côté Ecureuil) va jusqu'à évoquer la suppression de 10.000 emplois, en tenant compte des 4.500 suppressions d'emplois déjà programmées à la Caisse d'Epargne en application de son plan de rationalisation.
Un chiffre démenti par la direction. Pour répondre aux inquiétudes des syndicats, M. Pérol leur a par ailleurs adressé lundi un courrier dans lequel il s'engage à ne recourir qu'à des départs volontaires le cas échéant. Il propose aussi de les associer à la réflexion stratégique du futur groupe.
Car la situation préoccupante de Natixis, recapitalisée par l'Etat après une nouvelle perte record au premier trimestre, fait craindre que les banques ne cherchent à se séparer de certaines de leurs filiales pour se remettre à flot.