La patronne du FMI, Christine Lagarde, s'est dite prête jeudi à donner à la Grèce deux ans de plus pour atteindre les objectifs de réduction de déficit exigés par ses créanciers, mais la question du financement du pays pendant cette période reste totalement en suspens.
"Un délai supplémentaire de deux ans est nécessaire (pour la Grèce, ndlr) pour faire face au programme d'assainissement de ses finances publiques", a déclaré Mme Lagarde lors d'une conférence de presse à Tokyo, où se tient l'assemblée annuelle du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.
En contrepartie de son renflouement décidé en mars, la Grèce s'est notamment engagée auprès de ses créanciers de la troïka (FMI, BCE, UE) à ramener son déficit public à 2,1% en 2014 contre 7,3% prévus cette année.
Alors que le pays est plongé dans une cinquième année de récession, le gouvernement grec répète que cet objectif n'est pas réaliste et réclame deux années supplémentaires, jusqu'en 2016, pour y parvenir.
Le FMI avait avait déjà relevé de "bons arguments" pour accorder ce délai à Athènes mais c'est la première fois que Mme Lagarde s'y déclare publiquement favorable.
"Au lieu d'une réduction frontale et massive, il est parfois préférable d'avoir un peu plus de temps étant donné que beaucoup de pays sont actuellement engagés dans des politiques de réduction des déficits", a expliqué la patronne du FMI.
Mais accorder un délai à Athènes ne règle pas une question centrale: comment le pays, privé d'accès aux marchés pour emprunter à long terme, va-t-il se financer jusqu'en 2016? En clair, qui paiera l'addition?
Fin septembre à Washington, Mme Lagarde elle-même avait souligné que le pays faisait face à un "trou de financement" et que le problème de la dette grecque devrait être "réglé".
Le FMI semble toutefois n'avoir aucune intention de remettre la main à la poche et de participer à un troisième plan d'aide à la Grèce, après avoir déjà accordé au pays le plus grand prêt de son histoire.
Au sein de l'institution de Washington, certains pays émergents commencent à voir d'un mauvais oeil l'ampleur de l'aide accordée par le Fonds à la zone euro et à la manière dont la "troïka" fonctionne.
Les créanciers privés ayant déjà été mis à contribution en effaçant plus de 100 milliards d'euros, les regards se tournent vers les autorités européennes.
"Tout fonds additionnel viendra exclusivement de l'Europe. Le FMI a épuisé toutes ses possibilités" de prêts, selon le représentant grec au FMI, Thanos Catsambas.
Athènes avait un temps caressé l'espoir que la Banque centrale européenne accepte de restructurer une partie des obligations grecques qu'elle détient. Mais la BCE a rejeté cette éventualité estimant que cela reviendrait à financer directement un Etat-membre, ce qui est interdit par les traités.
L'UE ne semble pas mieux disposée à cet égard. Les dirigeants européens ont dit qu'ils étaient prêts à donner plus de temps à la Grèce mais "probablement" pas d'argent, laissant craindre une véritable impasse.
Pourtant, le temps presse. Le Premier ministre grec Antonis Samaras a prévenu que les "caisses (seraient, ndlr) vides" à la fin novembre si une nouvelle tranche d'aide de 31,5 milliards d'euros bloquée depuis juin n'était pas versée.
Par ailleurs la dette publique continue à glisser dangereusement et devrait dépasser 180% du produit intérieur public en 2013, d'après les nouvelles estimations du FMI. Selon ces projections, la dette devrait s'élever à 152,8% du PIB en 2017 alors que l'accord du pays avec la troïka tablait sur moins de 140% cette année-là et 120% en 2020.