BERLIN (Reuters) - Edouard Philippe a présenté vendredi à Berlin la stratégie de réformes de son gouvernement avec la volonté de démontrer que la France est un partenaire solide avec lequel l'Allemagne doit accepter d'engager une réforme ambitieuse de la zone euro.
Le Premier ministre français a détaillé les décisions du nouvel exécutif pour redresser les finances publiques et la compétitivité du pays en réduisant les prélèvements pour les travailleurs, les entreprises et les investisseurs.
"Ce cap est exigeant, difficile, assez inédit, incontournable si nous voulons restaurer notre crédibilité, recouvrer notre souveraineté, baisser les impôts et financer les priorités d'avenir", a-t-il dit devant des chefs d'entreprise.
L'urgence pour Emmanuel Macron et son Premier ministre est d'effacer l'image présumée d'une France renâclant à l'effort, ce à quoi la réforme du droit du travail et le retour dans les clous budgétaires, différé pendant des années, doivent contribuer.
"L’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, tous nos partenaires ont besoin d’une France forte, l'attente est donc immense", a déclaré Edouard Philippe.
Le président français fera dans quelques jours une série de propositions pour "refonder l'Europe" sur les dix prochaines années, dont un renforcement de l'Union économique et monétaire regardé avec perplexité par les dirigeants allemands.
Au coeur de leur attention, son souhait de créer un budget de la zone euro, doté un jour de centaines de milliards d'euros, associé à une capacité d'emprunt commune, piloté par un exécutif permanent et dont un Parlement contrôlerait l'usage.
PARIS ET BERLIN ENCORE LOIN D'UN COMPROMIS
Selon une source diplomatique, le chef de l'Etat s'exprimera le 26 septembre, deux jours après les élections législatives que la chancelière Angela Merkel est en passe de remporter.
L'Elysée n'a pas confirmé cette date mais plusieurs sources ont récemment souligné qu'il faudrait le faire suffisamment tôt pour que ses propositions soient prises en compte dans les négociations de formation de la future coalition gouvernementale.
De la couleur de cette coalition - une reconduction de l'alliance CDU-SPD ou l'arrivée des libéraux du FDP au côté de la CDU - dépendra la position allemande, le FDP étant moins proche des positions françaises sur l'avenir de la zone euro.
Sans attendre, des responsables allemands assurent que Berlin refusera tout système ressemblant à des "eurobonds", par lequel le contribuable allemand se trouverait responsable de dettes que d'autres Européens pourraient ne pas assumer.
Les Allemands proposent quant à eux d'élargir les pouvoirs du Mécanisme européen de stabilité (MES), une solution vue à Paris comme complémentaire d'un budget de la zone euro.
Les dirigeants allemands sont également ouverts à la création d'un budget spécifique mais d'un montant bien moins élevé que celui évoqué par Emmanuel Macron.
Edouard Philippe devait déjeuner avec Angela Merkel puis s'entretenir avec le président Frank-Walter Steinmeier.
(Jean-Baptiste Vey à Paris, avec Noah Barkin à Berlin, édité par Sophie Louet)