Les vignobles français ont connu depuis le début avril des épisodes de gel, en particulier le Bordelais, la Bourgogne et le Beaujolais, avec des conséquences encore difficiles à mesurer mais qui semblent moins dramatiques qu'il y a deux ans.
Dans le Bordelais, le coup de froid a frappé pendant deux nuits consécutives, jeudi et vendredi derniers. "Globalement 5%" du vignoble" a été touché, selon Christophe Château, directeur de la communication du Conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux (CIVB).
Les effets du gel se sont fait sentir "un peu partout, mais de manière très ponctuelle, très diffuse", observe Philippe Abadie, directeur "entreprises et développement" à la Chambre d'agriculture de Gironde.
Rien de comparable toutefois à 2017, quand deux nuits de gel printanier avaient fouetté le vignoble bordelais, avec des températures atteignant -5°C à -6°C. "40% de la récolte globale avaient été perdus et jusqu'à 100% sur les vignobles les plus touchés", rappelle-t-on au CIVB.
En Bourgogne, la région de Chablis a été la plus durement affectée par ce gel "sec, avec du vent", selon le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVB), estimant qu'il était encore trop tôt pour en dresser un premier bilan.
"Comme on est au tout premier stade de la feuille, voire du bourgeon, on ne sait pas comment la vigne va réagir", ajoute-t-on, en misant sur le soleil annoncé dans les jours à venir et les "quelques gouttes" tombées mercredi.
Là aussi, le BIVB minimise la comparaison avec 2016 et 2017, cette dernière année ayant été une "catastrophe" pour Daniel Seguinot, viticulteur à Maligny (Yonne).
- Arroser pour ne pas geler -
Dans le Chablisien, les viticulteurs ont eu recours aux bougies pour protéger leurs vignes mais aussi à un dispositif plus rare: l'aspersion. "On arrose les vignes avec de l'eau en continu, et aussi bizarre que cela paraisse, l'eau en gelant dégage de la chaleur et maintient le bourgeon à zéro degré, et à zéro ça ne gèle pas", assure M. Seguinot.
Dans le Beaujolais, le thermomètre est descendu le 5 avril jusqu'à "-2, -3°C", couplé à de la rosée, affectant particulièrement les plaines (Chénas, Moulin à Vent, Saint-Georges-de-Reneins, Vallée d'Azergues), détaille le vice-président d'Inter Beaujolais, David Ratignier.
Et ici, ils sont peu à disposer de systèmes anti-gel, "qui demandent des moyens très importants que le Beaujolais n'a pas".
L'inquiétude de M. Ratignier concerne particulièrement le chardonnay (blanc), plus touché et dont l'essentiel des raisins se trouvent sur le premier bourgeon. Sur le gamay (rouge), "ça peut ressortir", espère-t-il.
"Ce gel, sur 1.500 à 2.000 hectares, c'est un très mauvais début, sans compter qu'un deuxième élément nous inquiète pour la suite de la campagne, c'est la sécheresse qui est déjà très importante", alerte-t-il.
En Savoie, "quelques bourgeons ont été touchés par le gel, mais aucune parcelle entière. Peu de dégâts, rien de dramatique", assure Michel Bouche, directeur du Syndicat régional des vins de Savoie. "Cela pourrait limiter un petit peu le rendement mais ce sera sur un petit pourcentage du vignoble", ajoute-t-il.
Dans les Pays de Loire, Fred Niger, vigneron en biodynamie au Landreau (Loire-Atlantique), se désole d'avoir perdu "80%" de sa production, avec "trois années de gel sur quatre".
"Le problème actuellement ce n'est pas de produire du vin, c'est de produire du raisin", lance M. Niger, attribuant ces pertes au "réchauffement climatique" qui fait démarrer la vigne plus tôt et la rend plus sensible aux gelées.