Les marchés financiers accueillaient avec une grande prudence lundi la victoire de la droite aux élections grecques qui écarte temporairement le spectre d'une sortie du pays de l'euro, les investisseurs restant méfiants face aux défis à venir pour l'union monétaire.
Après avoir ouvert en hausse, la tendance s'est rapidement retournée sur la plupart des places financières en Europe. A 10H38 (08H38 GMT), Paris était stable à -0,03%. Londres reculait de 0,14%, Madrid de 1,80% et Milan de 1,59%. Seul Francfort parvenait encore à grignoter 0,34%.
Sur le marché obligataire, les taux d'emprunt de l'Espagne et de l'Italie, cibles des attaques des investisseurs ces dernières semaines, repartaient à la hausse après un bref répit à l'ouverture, à des niveaux jugés insoutenables pour ces pays sur le long terme. Le taux espagnol à 10 ans dépassait ainsi les 7%, affichant un nouveau record.
Enfin, l'euro ne progressait que très timidement face au dollar à 1,2656 dollar contre 1,2644 dollar vendredi soir.
La victoire à l'arraché de la droite pro-euro aux législatives en Grèce dimanche, cruciales pour l'avenir du pays et de la zone euro, semble avoir au final peu rassuré les marchés même si elle aboutit à la formation d'un gouvernement crédible autour du dirigeant conservateur Antonis Samaras.
Le pays se retrouve "au point où il en était avant" le scrutin du 6 mai qui avait vu la victoire des partis anti-euro, prévient Yoshikiyo Shimamine, analyste au Dai-ichi Life Research Institute à Tokyo.
Les craintes d'une faillite de la Grèce --assortie à une sortie de la zone euro-- sont écartées à court terme mais Athènes risque "une spirale de politiques d'austérité" qui plombera encore davantage l'économie, prévient l'analyste.
Pour Philippe Waechter, directeur des études économiques chez Natixis AM, il faut au plus vite que les partenaires européens entament "des négociations pour discuter du montant de la dette grecque, des intérêts payés et des objectifs budgétaires fixés afin de rendre l'ensemble soutenable à moyen terme".
L'objectif doit être de limiter le risque d'instabilité sociale dont profiterait certainement Syriza, le parti de gauche anti-austérité arrivé deuxième aux élections de dimanche.
Dès dimanche soir, Berlin a d'ailleurs envoyé un signal d'une inflexion dans sa position. Le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a évoqué des discussions sur "les délais" pour la mise en oeuvre du programme de réformes négocié par Athènes avec l'Union européenne et le Fonds monétaire international en échange de son sauvetage financier.
La victoire de la droite n'"est qu'une étape et d'énormes défis attendent encore le pays", avertit Erik Nielsen, chef économiste à UniCredit.
L'analyste rappelle notamment que les retraits d'argent en Grèce se sont grandement accélérés depuis le 6 mai, "atteignant selon la presse locale deux milliards d'euros pour les seules journées de jeudi et de vendredi".
"Les prochains jours seront décisifs sur la mise en place ou non d'un contrôle des capitaux" qui restreindrait les sorties de liquidités du pays, souligne Christian Parisot, économiste chez Aurel BGC.
Dans l'immédiat, un premier soulagement pour les investisseurs passerait par le déblocage d'une nouvelle tranche d'aide de la troïka (UE-BCE-FMI), estime M. Nielsen.
Il faut aussi que lors du sommet européen qui va se tenir à la fin du mois on puisse offrir "une carotte aux responsables grecs en leur proposant des financements modestes afin de relancer la croissance", ajoute-t-il.
En plus, l'Europe doit au plus vite prendre des mesures énergiques pour éviter un effet domino qui emporterait l'Italie et l'Espagne fragilisées par les difficultés de leurs banques et l'envol de leurs taux d'emprunt sur les marchés obligataires.
Lors du G20 qui débute ce lundi au Mexique, "les dirigeants européens devraient essayer de s'entendre sur un transfert plus important de souveraineté afin de rendre plus homogènes et plus cohérents les comportements de chaque gouvernement", estime M. Waechter.
L'élection grecque a maintenu en haleine aussi bien les milieux financiers que les gouvernements des pays de la zone euro, qui craignaient une sortie précipitée de la Grèce de la zone euro si le candidat de la gauche radicale anti rigueur Alexis Tsipras l'emportait.
Selon des résultats officiels portant sur 85% des voix exprimées, la Nouvelle Démocratie, dirigée par M. Samaras, a obtenu 29,96% des voix, soit 130 sièges sur les 300 du Parlement, en bénéficiant de la prime de 50 sièges accordée par la loi électorale au premier parti.