par Andreas Cremer
WOLFSBURG (Allemagne) (Reuters) - Volkswagen (XETRA:VOWG) a soumis aux autorités allemandes ses premières propositions dans le dossier de la fraude aux tests anti-pollution, et redit qu'il faudrait du temps pour tourner la page de ce scandale sans précédent dans l'histoire du groupe.
Près de trois semaines après la révélation de l'affaire par les autorités américaines, le premier constructeur automobile européen est sommé d'identifier les responsables de la fraude, de dire comment il compte mettre ses voitures en conformité avec la loi et si le groupe a manipulé les tests en Europe comme aux Etats-Unis.
"Des spéculations ou des informations trop vagues sur d'éventuelles avancées ne font l'affaire de personne", a déclaré mercredi Hans Dieter Pötsch, le nouveau président du conseil de surveillance du groupe, lors d'une conférence de presse après avoir été confirmé à son nouveau poste.
"Il faudra donc du temps jusqu'à ce qu'on ait des résultats factuels et fiables qui nous permettent de vous apporter une information globale", a-t-il dit, refusant tout autre question.
Hans Dieter Pötsch s'exprimait à l'issue d'une réunion extraordinaire des 20 membres du conseil au siège de Wolfsburg, destinée à discuter des résultats de l'enquête interne menée par le groupe.
Volkswagen a par ailleurs soumis mercredi à la KBA, l'autorité fédérale allemande du secteur automobile, un tout premier plan de modification des quelque 11 millions de véhicules concernés.
Le ministre des Transports, Alexander Dobrindt, a déclaré à la presse que selon ce rapport, "pour les moteurs 2,0 litres, VW dit qu'une solution logicielle sera prête cette année et qu'elle sera mise en oeuvre à partir du début de l'an prochain".
LE PATRON DE LA FILIALE US AU CONGRÈS
"Pour les moteurs 1,6 litre, en plus du nouveau logiciel, des modifications du moteur seront nécessaires, ce qui, selon Volkswagen, ne sera pas prêt avant septembre 2016", a-t-il ajouté.
Il a précisé que la KBA allait examiner ces propositions et soumettre d'éventuelles demandes supplémentaires à VW.
Jeudi, le président de la filiale américaine, Michael Horn, doit témoigner devant une sous-commission du Congrès américain.
Une source proche du dossier a indiqué qu'un "certain degré de frayeur" régnait parmi les dirigeants du groupe avant cette audition.
Cette source a ajouté qu'il était trop tôt pour nommer des responsables de l'installation des logiciels sur certains moteurs diesel destinés à truquer les tests anti-pollution.
Dans un témoignage écrit avant cette audition, Michael Horn explique que le groupe a retiré la demande de certification de ses modèles 2016 aux Etats-Unis car la présence d'un composant logiciel aurait dû être déclarée aux autorités fédérales et californiennes.
Il n'a pas donné davantage de détails, ajoutant que le processus de certification se poursuivait.
"BEAUCOUP DE QUESTIONS, TRÈS PEU DE RÉPONSES"
"Nous avons beaucoup de questions; nous avons très peu de réponses", a dit Diana DeGette, principale élue démocrate de la sous-commission de la Chambre des représentants qui doit l'entendre jeudi.
Selon une lettre publiée mercredi, des sénateurs influents de la commission des Finances du Sénat américain étudient d'éventuelles mesures concernant les crédits d'impôts accordés par l'Etat fédéral aux consommateurs ayant investi dans des voitures prétendues "propres".
En Allemagne, Stephan Weil, le Premier ministre du Land de Basse-Saxe, qui est le deuxième actionnaire de Volkswagen, a rejeté les critiques mettant en cause la lenteur des réactions du groupe face au scandale.
"L'enquête est en réalité menée à vive allure. Nous ne faisons pas les choses selon les normes allemandes, nous les faisons selon les normes américaines", a-t-il dit, ajoutant que le cabinet américain Jones Day avait également engagé une enquête externe sur la manipulation des tests anti-pollution.
La chancelière Angela Merkel a quant à elle déclaré devant le Parlement européen qu'elle pensait que Volkswagen faisait de son mieux pour résoudre les problèmes et elle a appelé un responsable du parti des Verts à ne pas en profiter pour condamner la totalité de l'industrie automobile.
"Cela met en péril des milliers et des milliers d'emplois européens", a-t-elle dit.
Les analystes du cabinet d'étude Equinet estiment que le coût de la mise en conformité des véhicules touchés pourrait aller de moins de 100 euros par véhicule jusqu'à 10.000 euros, selon que VW devra simplement rectifier les logiciels ou procéder à d'importantes modifications du moteur.
UBS estime de son côté que le coût total du scandale, y compris les amendes et frais de justice, pourrait atteindre 35 milliards d'euros, tout en notant qu'il est déjà plus qu'intégré dans le cours de l'action à la suite de son récent plongeon.
(avec Caroline Copley, Barbara Lewis, Jan Schwartz, Noah Barkin, David Morgan et les bureaux de Reuters, Juliette Rouillon, Véronique Tison et Marc Angrand pour le service français)