Les ventes de détail en Chine, baromètre de la consommation des ménages, ont ralenti plus fortement qu'attendu en juillet, malgré les efforts de Pékin pour relancer la demande, tandis que la production industrielle décélérait --nouveaux signes d'essoufflement de la deuxième économie mondiale.
Les ventes de détail dans le pays ont progressé le mois dernier de 10,2% sur un an, a annoncé vendredi le Bureau national des statistiques (BNS).
C'est bien moins que l'augmentation de 10,6% en juin, et très en-deçà de la prévision médiane (+10,5%) des analystes sondés par Bloomberg --et ce malgré la résistance des ventes automobiles.
Cet accès de faiblesse inattendu des achats des ménages en Chine intervient alors que Pékin entend rééquilibrer son modèle de croissance au profit de la consommation intérieure et des services.
Le secteur des services, porté notamment par l'envolée des ventes sur internet, représente désormais plus de la moitié du Produit intérieur brut (PIB) du géant asiatique.
La robustesse persistante des ventes de détail, à la faveur d'un assouplissement continuel du crédit, avait d'ailleurs largement contribué à une stabilisation-surprise de la croissance économique chinoise au deuxième trimestre, à 6,7%.
Autre déception sur le front de la production industrielle: elle s'est affichée en juillet en hausse de 6% sur un an selon le BNS, là encore en ralentissement par rapport à juin (+6,2%) et en-deçà des prévisions.
"La dynamique économique perd encore de son élan, et les inondations" qui ont en juin et juillet dévasté plusieurs provinces du sud et du centre du pays, "ont pu exagérer la tendance", observait Yang Zhao, de Nomura.
"Les inondations ont perturbé la production dans la ceinture économique du fleuve Yangtsé", abonde Louis Lam, de la banque ANZ. Et les efforts des autorités pour réduire les surcapacités industrielles devraient continuer de faire pression sur la production au deuxième semestre, poursuivait-il.
-L'offre d'acier gonfle encore-
Les industries lourdes chinoises restent plombées par une demande maussade --sur fond de plongeon des exportations--, par de colossales surcapacités de production et un endettement galopant, notamment dans la sidérurgie.
Pour autant, au grand dam des sidérurgistes européens qui dénoncent un dumping, la production d'acier chinoise continue d'accélérer, avec une hausse de 2,6% sur un an en juillet contre seulement +1,7% en juin.
"Dans l'ensemble, le développement économique se maintient dans une fourchette acceptable, avec des progressions solides", insiste cependant le BNS.
La transition économique engagée par la Chine s'avère douloureuse et chaotique, et les réformes structurelles promises patinent --même si le BNS a assuré vendredi que Pékin allait "avancer de façon inébranlable" sur ce terrain.
Pire, en multipliant les assouplissements monétaires pour stimuler l'activité, les autorités ont encouragé une envolée du crédit, dont résulte aujourd'hui une alarmante montée de l'endettement (à quasiment 250% du PIB au total) et des créances douteuses à même de fragiliser le système financier.
-Relance budgétaire accrue?-
Malgré les coups de pouce des autorités, les piliers traditionnels de la croissance chinoise s'effritent.
Les échanges commerciaux ont encore dégringolé en juillet, les exportations chutant de 4,4% sur un an et les importations s'enfonçant pour le 21e mois consécutif.
Même le crucial secteur immobilier et de la construction, qui s'était ressaisi après une longue période de refroidissement, recommence à caler: les investissements dans l'immobilier ont fortement ralenti en juillet, selon le BNS, avec une hausse de 5,3% sur un an pour les sept premiers mois de 2016, contre 6,1% pour l'ensemble du premier semestre.
Enfin, les investissements en capital fixe --baromètre des dépenses publiques dans les infrastructures-- ralentissent très brusquement: ils ont gonflé de 8,1% sur un an sur les sept premiers mois de l'année, contre 9% sur l'ensemble du premier semestre.
Dans ces conditions, Nomura table sur de nouveaux assouplissements monétaires pour soutenir l'économie, dont une baisse supplémentaire des taux d'intérêts d'ici fin 2016.
Mais "les chiffres des investissements en capital fixe posent quand même la question de l'efficacité de cette politique monétaire toujours plus accommodante. Le crédit s'est envolé mais les investissements (dans l'économie réelle) restent limités", s'égarant plutôt dans des placements spéculatifs, tempérait Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics.
Selon lui, le gouvernement devra donc renforcer les dépenses publiques "sous forme d'une politique de relance budgétaire plus énergique", s'il veut enrayer l'essoufflement économique et atteindre son objectif d'une croissance d'au moins 6,5% cette année.