par David Henry
NEW YORK (Reuters) - JPMorgan Chase, dont la taille a augmenté de plus de moitié depuis la crise financière, se soumet à une cure d'amaigrissement pour apaiser les régulateurs en général et la Réserve fédérale en particulier.
Si la première banque américaine cède suffisamment d'actifs purement financiers, la Fed est susceptible de penser que l'établissement est un peu moins risqué et ce dernier lui-même pourrait en tirer en profit en termes de rentabilité et meilleure rétribution de ses actionnaires.
De janvier à septembre, la banque a restitué 150 milliards de dollars de dépôts essentiellement à des fonds spéculatifs qui avaient déposé de l'argent sans usage immédiat.
Elle devrait continuer d'alléger ainsi son bilan et pourrait également choisir de faire affaire davantage avec des sociétés de l'économie réelle et moins avec d'autres établissements financiers, une manière également de paraître moins risquée aux yeux des régulateurs.
"Nous avons bien progressé", a dit la directrice financière de JPMorgan Marianne Lake, ajoutant toutefois: "Il devient de plus en plus difficile" de progresser encore sur cette voie dorénavant.
Selon les critères de la Fed, JPMorgan est la banque américaine dont la faillite causerait le plus de dégâts au système financier en raison de sa taille, de sa complexité et de ses contacts avec d'autres établissements.
La banque, qui a publié ses trimestriels mardi, a dit que ses actifs avaient diminué de 32,48 milliards de dollars, soit 1,3%, au troisième trimestre par rapport au précédent, au total de 2.420 milliards. Au deuxième trimestre, ils avaient diminué de 4,9%. C'est la première fois depuis 2009 que les actifs de la banque se contractent deux trimestres d'affilée.
Les initiatives déployées par la banque en ce domaine sur le seul premier semestre pourraient lui permettre de racheter jusqu'à trois milliards de dollars d'actions supplémentaires, soit 1,5% du flottant, selon un rapport de Susan Roth Katzke, analyste chez Credit Suisse. Ce faisant, son rendement des fonds propres pourrait progresser à 10,9% en 2016 contre 10,8%, estime l'analyste.
"BIZARRE" DE REFUSER L'ARGENT DES CLIENTS
Steven Chubak (Nomura) pense que l'action de la banque pourrait gagner deux dollars du seul fait des cessions d'actifs. Elle a perdu 1,6% à 60,55 dollars mardi en après-Bourse.
La crise financière a profité aux banques américaines les plus grandes, qui ont avalé des concurrents plus petits tels que Bear Stearns ou Merrill Lynch. Mais les régulateurs conçoivent un nouveau cadre réglementaire pour faire en sorte que les grosses banques ne constituent pas un risque inconsidéré pour le système financier.
La conséquence de l'une des règles en question se résume en des charges plus élevées pour ces banques, en les obligeant à financer leurs opérations avec moins de dette, ce qui ne revient pas cher à l'heure actuelle, et plus de fonds propres, ce qui est plus onéreux.
JPMorgan espère abaisser la quote part de fonds propres et réduire ses coûts. Avant le deuxième trimestre et suivant les dispositions en vigueur, JPMorgan devait financer au moins 12% de son actif ajusté avec des fonds propres et le reste avec de la dette. Ce ratio de fonds propres est supérieur de 4,5 points au moins à celui des établissements plus petits et il ajuste les actifs en fonction du risque qu'ils représentent.
Après la cure, la banque compte ramener la différence à juste quatre points.
Cela étant, alléger encore le bilan ne va pas de soi. La banque a commencé par ce qui était le plus évident, à savoir des relations de clientèle à l'évidence peu profitables, mais à présent elle ne voudrait pas s'aliéner de vrais bons clients.
"Aller voir un client et lui dire qu'on ne veut pas de son argent, c'est plutôt bizarre venant d'une banque", soulignait le PDG Jamie Dimon le mois dernier lors d'une conférence.
Lors d'une conférence téléphonique avec des analystes mardi, Jamie Dimon a dit que la banque pourrait encore progresser sur la question de l'utilisation des fonds propres dans les cinq à six prochaines années.
Si JPMorgan vend, elle investit aussi, dans les cartes de crédit en particulier, encourageant leur usage dans le règlement des dépenses de consommation et promouvant des services de traitement des factures à l'usage des commerçants, deux activités qui rapportent beaucoup et sont relativement peu gourmandes en capital.
Pour le même motif, la banque se tournera sans doute davantage vers la gestion de trésorerie et d'actifs pour les entreprises, observe l'analyste Susan Roth Katzke.
(Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)