par David Lawder
WASHINGTON (Reuters) - Le calme est revenu sur les marchés financiers mondiaux après les turbulences du début de l'année mais il faut faire davantage pour assurer la stabilité financière dans le monde dans un contexte de ralentissement de la croissance, de faiblesse des cours des matières premières et d'inquiétudes sur l'économie chinoise, prévient le Fonds monétaire international mercredi.
Dans son Rapport sur la stabilité financière dans le monde, l'organisation dit avoir observé une montée des risques auxquels est exposé le système financier depuis la publication du précédent rapport, en octobre.
Elle estime que les perturbations des marchés pourraient aisément être de retour et s'intensifier si rien n'est fait pour assainir le bilan des banques, notamment en Chine et en Europe.
"Sans ces mesures, les turbulences risquent de s'emparer de nouveau des marchés", lit-on dans le rapport. "Dans cette conjoncture, la montée des primes de risque pourrait durcir davantage les conditions financières et créer un cercle vicieux de crise de confiance, d'affaiblissement de la croissance, de repli de l'inflation et d'alourdissement de la dette."
"Les perturbations des marchés mondiaux des actifs pourraient accroître le risque d'un ralentissement plus grave et persistant marqué par une stagnation économique et financière", ajoute le FMI.
Les inquiétudes face au ralentissement de la croissance chinoise et de la transition du pays vers une économie plus orientée vers la consommation ont contribué à déclencher la dernière crise financière dit le FMI, qui note que les difficultés des entreprises publiques chinoises pèsent sur les bilans des banques.
Dans son rapport, le Fonds estime que les prêts des banques aux entreprises potentiellement à risque en Chine pourraient se traduire par des pertes bancaires représentant environ 7% du produit intérieur brut du pays.
"Cela peut sembler un chiffre important mais il est gérable vu les réserves de fonds propres des banques et des institutions et la poursuite d'une forte croissance de l'économie", a dit Jose Vinals, responsable du département des marchés monétaires et de capitaux du FMI.
Ce rapport vient compléter les dernières perspectives économiques mondiales du FMI publiées mardi, dans lequel le Fonds a revu en baisse ses prévisions pour la croissance mondiale pour la quatrième fois en un an.
Il est publié alors que les ministres de Finances et les banquiers centraux se retrouvent à Washington cette semaine pour les rencontres de printemps du FMI, de la Banque mondiale et du G20. Les rencontres officielles auront lieu de vendredi à dimanche inclus.
TAUX NÉGATIFS ESSENTIELS POUR LA CROISSANCE
Le Rapport du FMI sur la stabilité financière affirme en outre que les politiques de taux d'intérêt négatifs, accompagnés de politiques de rachats d'obligations, sont "essentiels" pour soutenir la croissance économique.
Cette prise de position contraste avec celle du ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, qui a critiqué les taux négatifs mis en place par la Banque centrale européenne, estimant qu'ils créaient des difficultés pour les banques et les épargnants allemands.
Tout en voyant leurs marges bénéficiaires baisser, les banques profiteront en dernier ressort de la reprise de la croissance et de leur capacité à réduire leurs coûts de financement, relève le FMI.
Jose Vinals, a précisé à la presse qu'elles bénéficieraient également de la revalorisation des actifs qu'elles détiennent, notamment les obligations souveraines.
Toutefois, si le scénario noir du FMI de crise des marchés se réalise, ses modèles prédisent une croissance mondiale amputée de 3,7 points de pourcentage sur cinq ans - représentant la perte de près d'une année de croissance aux rythmes actuels.
A contrario, le Fond ajoute dans son rapport que toute action pour réduire les risques de liquidité, via la liquidation des créances douteuses héritées de la dernière crise financière dans les économies développées et la réduction de la vulnérabilité des banques dans les pays émergents, pourraient ajouter 1,7 point de pourcentage à la croissance annuelle, dans le scénario de base, d'ici 2018 -- soit environ la moitié de la croissance estimée pour cette année.
Le rapport évoque aussi la nécessité de consolider le secteur bancaire en Europe, estimant que les banques dont les modèles économiques ne sont plus viables à la suite de la crise financière représentent environ 15% des actifs bancaires dans les économies avancées.
Jose Vinals a déclaré par ailleurs à la presse qu'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne serait un "choc négatif" pour les économies britanniques et européennes, comme pour le statut de centre financier international de Londres.
(Juliette Rouillon pour le service français, édité par Marc Joanny)