PARIS (Reuters) - Le directeur de la police nationale a ordonné une enquête sur la manifestation sauvage de policiers dans la nuit de lundi à mardi sur les Champs-Elysées à Paris, où les forces de l'ordre ont exprimé leur mécontentement envers le gouvernement.
Jean-Marc Falcone dénonce le "comportement inacceptable" des policiers qui, malgré leur devoir de réserve, ont manifesté parfois alors qu'ils devaient être en service ou avec des véhicules de service.
"Ces modalités de l'expression publique des policiers étaient contraires à leurs obligations statutaires. Par ce comportement, ils fragilisent la police nationale et fragilisent aussi chaque policier", écrit-il dans un communiqué.
Une enquête a été confiée à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) afin de "déterminer et de préciser les manquements individuels aux règles statutaires", précise-t-il.
Dix jours après l'attaque au cocktail Molotov contre un équipage de police à Viry-Châtillon, près de 500 policiers, en tenue civile, ont circulé à bord de véhicules, gyrophares allumés, autour de l'Arc de Triomphe ainsi que sur l'avenue la plus célèbre du monde, avant de chanter la Marseillaise.
Chose rare, les policiers frondeurs, qui savaient s'exposer à des sanctions, ont manifesté spontanément, hors de tout cadre syndical.
Les manifestants reprochent au Premier ministre Manuel Valls et au ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve de multiplier les déclarations mais de ne pas leur donner réellement les moyens humains et matériels d'exercer leurs missions.
"EFFET DE MANCHE"
Le rassemblement, auquel participaient de nombreux policiers de l'Essonne, le département où se trouve Viry-Châtillon, avait débuté vers 23 heures devant l'hôpital Saint-Louis où est hospitalisé un adjoint de sécurité très grièvement brûlé le 8 octobre par un cocktail Molotov.
Les policiers venus de toute l'Ile-de-France se sont ensuite rendus sirènes hurlantes vers 01h00 sur les Champs-Elysées pour exprimer leur colère.
Le lendemain de l'attaque de Viry-Châtillon, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve s'étaient rendus dans des commissariats du département.
Le Premier ministre a ensuite annoncé le 11 octobre de nouvelles mesures de protection des policiers intervenant en zone sensible, avec la sécurisation des véhicules et des équipages.
Mais les syndicats de police n'avaient pas caché leur scepticisme.
Raillant la "promenade médiatique" de Manuel Valls et Bernard Cazeneuve à Viry-Châtillon, la CGT police a dénoncé un "effet de manche" et mis en doute la réalité des recrutements annoncés par le gouvernement.
"Selon le rapport annuel annexé au projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes pour 2015 et la note d'analyse sur l'exécution budgétaire 2015, sortis le 25 mai 2016, et ce malgré les promesses de création de 9.000 postes, ce sont seulement 110 emplois qui ont été créés dans la police nationale et 280 dans la gendarmerie", écrivait le syndicat.
Bernard Cazeneuve s'est élevé contre la mise en doute des embauches annoncées, affirmant le 13 octobre à Lyon que le gouvernement avait bien créé 9.000 emplois depuis 2012, alors que la droite en avait supprimé 12.000 les années précédentes.
"Je ne dis pas que les chiffres font une politique. Mais je crois à l’autorité de l’Etat, moins au besoin de vacarme derrière les tribunes", avait-il dit, visant une tribune dans la presse d'Alain Juppé, candidat à la primaire de la droite et du centre.
(Gérard Bon, édité par Yves Clarisse)