par Steve Holland et Mark Hosenball
WASHINGTON (Reuters) - Donald Trump a annoncé vendredi son intention de prendre des mesures pour lutter contre les cyberattaques visant les Etats-Unis dans les 90 jours après son entrée à la Maison blanche.
Le futur président, qui prendra ses fonctions le 20 janvier, a fait cette déclaration à l'issue d'un entretien avec les responsables des services de renseignement américains.
Ces derniers ont rendu public après cette rencontre une version déclassifiée de leur rapport, dans lequel ils accusent la Russie d'avoir cherché à influencer la campagne électorale pour favoriser l'élection de Donald Trump.
La rencontre, qui s'est tenue dans un lieu tenu secret, a essentiellement porté sur leurs accusations de piratage informatique portées contre Moscou, dont le président-élu a cherché à de nombreuses reprises à minimiser l'importance.
Ces cyberattaques, dont Donald Trump a finalement admis l'existence dans un communiqué émis à l'issue de l'entretien, n'ont eu, assure cependant l'homme d'affaires, "absolument aucune incidence sur le résultat" de l'élection du 8 novembre qui l'a vu battre la démocrate Hillary Clinton.
Dans un entretien accordé au New York Times avant la rencontre, le milliardaire républicain estime par ailleurs que toutes ces accusations de piratage informatique constituent une "chasse aux sorcières politique".
"Récemment, la Chine a piraté les noms de 20 millions d'employés gouvernementaux", dit-il, se référant à l'intrusion de pirates dans les serveurs du Bureau de gestion du personnel administratif américain en 2014 et 2015.
"Comment se fait-il que personne n'en parle ? C'est une chasse aux sorcières politique", affirme-t-il à propos des critiques visant la Russie.
"Cela dit, poursuit-il, je ne veux pas que d'autres pays piratent notre pays."
"Ils ont piraté la Maison blanche, ils ont piraté le Congrès. Nous sommes devenus la première cible mondiale du piratage", insiste Donald Trump dans cet entretien.
Le futur président des Etats-Unis a plusieurs fois contesté les conclusions des agences fédérales de renseignement affirmant que la Russie s'était livrée à un piratage du Parti démocrate afin de favoriser sa candidature.
RAPPORT SÉVÈRE POUR LA RUSSIE
Donald Trump s'est entretenu vendredi à ce sujet avec le directeur du renseignement national, James Clapper, ainsi que les chefs de la CIA et du FBI.
Dans un rapport déclassifié rendu public après la rencontre, les agences de renseignement disent être parvenues à la "quasi certitude" que le président russe Vladimir Poutine a donné personnellement l'ordre d'influencer la campagne électorale américaine et d'aider Donald Trump à remporter le scrutin.
"Nous estimons que Poutine et le gouvernement russe avaient une préférence claire pour le président-élu Trump (et) qu'ils entendaient renforcer ses chances de victoire à chaque fois que possible en discréditant Hillary Clinton", écrivent-elles.
Les agences disent avoir aussi la quasi certitude que leurs homologues russes, notamment le GRU (renseignements militaires), ont mené des cyberattaques contre des cibles dans les deux camps et utilisé Guccifer 2.0 (qui a revendiqué le piratage du Parti démocrate), DCLeaks.com et WikiLeaks pour rendre publiques certaines données piratées.
Le rapport ajoute que depuis l'élection de Donald Trump, les services de renseignement russes ont lancé une nouvelle campagne de hameçonnage (phishing) visant des employés du gouvernement et des personnes liées à des cercles de réflexion et autres ONG travaillant dans les domaines de la sécurité nationale, de la défense et de la politique étrangère.
Les agences de renseignement américaines soulignent que la stratégie d'influence russe s'appuie sur des opérations secrètes, comme les cyberattaques, mais aussi sur des médias financés par Moscou, sur des intermédiaires et sur des utilisateurs des réseaux sociaux rétribués à cet effet.
Les responsables démocrates au Congrès ont aussitôt réclamé une enquête approfondie et une "réponse forte" aux conclusions du rapport, estimant qu'il en va, selon les mots du sénateur Mark Warner, "de la solidité de la démocratie américaine".
Donald Trump a pour sa part déclaré qu'il désignerait dès son arrivée à la Maison blanche une équipe chargée de lui soumettre dans les 90 jours un plan anti-piratage informatique, tout en laissant entendre qu'il garderait ses conclusions secrètes.
"Les méthodes, outils et tactiques que nous utilisons pour protéger l'Amérique ne doivent pas faire l'objet d'un débat public qui profiterait à ceux qui veulent nous faire du tort", a-t-il souligné.
(Avec Warren Strobel et Yara Bayoumy, avec Amy Tennery à New York et Patricia Zengerle à Washington, Gilles Trequesser et Tangi Salaün pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)