Le chômage touche désormais 11% de la population en âge de travailler dans la zone euro, un niveau jamais vu et qui pourrait encore croître dans les mois qui viennent face à une probable aggravation de la crise économique, préviennent de nombreux économistes.
Le taux de chômage a atteint ce niveau record en avril comme en mars où le chiffre a été révisé à la hausse, selon Eurostat.
Le seuil de 11% n'avait jamais été atteint depuis la création de la zone euro en 1999, mais ce niveau ne surprend guère les analystes interrogés par l'agence Dow Jones Newswires qui s'attendaient à un tel chiffre en avril.
Cela signifie au total que 17,40 millions de personnes étaient sans emploi en avril dans l'Union monétaire, soit 110.000 de plus que le mois précédent, en raison notamment du nombre de chômeurs découragés, suggère Martin Van Vliet, analyste pour la banque néerlandaise ING.
"Les entreprises sont pour la plupart sous forte pression pour limiter leurs effectifs afin de contenir leurs coûts face à une faible demande, une forte concurrence, des marges serrées et des perspectives très incertaines", souligne Howard Archer, économiste pour IHS Global Insight.
La situation est critique: il s'agit du douzième mois consécutif au cours duquel le chômage a atteint ou dépassé le seuil de 10% dans la zone euro. En un an, 1,79 million de personnes sont venues grossir les rangs des sans emploi.
Pire, l'horizon est bouché, alors que la zone euro semble se diriger vers une nette contraction de son activité au second trimestre.
"Nous pensons que le taux de chômage va atteindre ou légèrement dépasser les 11,5%, en tablant sur le fait que la zone euro sorte de récession plus tard cette année", estime Martin Van Vliet, analyste pour la banque néerlandaise ING.
Mais ce scénario semble optimiste sachant que la zone euro pourrait voir son activité se contracter plus longtemps que prévu, comme le suggèrent les indices PMI notamment celui du secteur manufacturier publié vendredi. "Dans ce cas, le risque est d'atteindre un taux de chômage encore plus important", prévient-il.
De nombreuses disparités apparaissent toutefois entre pays du sud de l'Europe et ceux du nord, même si de nombreuses économies jugées solides "succombent à la morosité", souligne Jennifer Mac Keown de Capital Economics, citant le cas de la France, deuxième économie de la zone euro où le chômage a grimpé à 10,2% en avril contre 10,1% le mois précédent.
L'Espagne reste de loin le pays européen le plus affecté avec le taux de chômage le plus élevé d'Europe (24,3%). Le phénomène touche de plein fouet les moins de 25 ans, puisque plus d'un jeune sur deux est sans emploi dans le pays (51,5%).
En Grèce, le taux de chômage s'est lui inscrit à 21,7%, selon les dernières données disponibles pour ce pays, qui datent de février.
En revanche, les taux de chômage les plus bas sont enregistrés en Autriche (3,9%), au Luxembourg et aux Pays-Bas (5,2%) ainsi qu'en Allemagne (5,4%).
Ces mauvaises nouvelles "vont compliquer les efforts des pays les plus fragiles" soumis à des cures d'austérité et "pourraient rendre réticentes les économies les plus solides à fournir (à leurs voisins) l'aide dont ils ont désespérément besoin", estime l'économiste de Capital Economics.
La croissance et l'emploi sont devenues des priorités absolues pour les Européens, mais ils sont très divisés sur les moyens de les relancer, les pays partisans de l'orthodoxie budgétaire, Allemagne en tête, prônant plus de flexibilité dans le marché du travail, ce que refuse la France notamment.