Les avions se succèdent sur l'ancienne base de l'Otan à Châteauroux, où l'un des plus grands sites européens de peinture d'avions donne leurs couleurs aux futurs vaisseaux du ciel, profitant du boom de l'aéronautique pour doubler ses effectifs.
Alors que Boeing comme Airbus engrangent les commandes record, Aéro Technique Espace (ATE), première entreprise indépendante de peinture d'avions en France, va créer 40 emplois dans les mois qui viennent.
Des échafaudages enserrent un Airbus A330 comme un immeuble dont on ravalerait la façade. L'odeur de peinture n'est pas plus prégnante que sur un chantier ordinaire, mais les peintres arborent des combinaisons et des masques qui les protègent des particules volantes et du bruit.
Le travail est parfaitement organisé. Après le passage des préparateurs de surface qui ont poncé l'engin, les peintres appliquent au pistolet les couleurs primaires. Reste la finition qui s'effectue au pinceau. Très concentré, un homme s'applique sur le logo aux couleurs jaune de cadmium, violet et mauve d'un A330 de Thai Airways. Avec un pinceau encore plus fin, un autre a en charge la signalétique et l'immatriculation de l'appareil.
La peinture doit être résistante pour affronter les intempéries et le soleil ainsi que les énormes variations de température auxquelles sont soumis les aéronefs. Suivant sa taille, il faut entre huit et 10 jours pour peindre un appareil, qui doit repasser sous le pistolet tous les cinq à six ans en moyenne.
Sauf s'il a été racheté par une autre compagnie, auquel cas toute la livrée est à refaire...
Une quarantaine de personnes travaillent dans le Bâtiment 769 de l'aéroport de Châteauroux-Déols, construit par les Américains à la fin des années 50 et qui fut base aérienne de l'OTAN jusqu'en 1967.
Gros appels d'offre
Ce complexe de 16.000 m2 est réparti en quatre salles de peinture. Deux sont dédiées aux avions gros porteurs, une troisième aux moyens porteurs et une quatrième aux avions de transport régional. La facture pour un A320: environ 60.000 euros hors taxes.
La PME, qui compte au total 160 salariés à Toulouse, Bordeaux, Agen et Châteauroux, vient d'être rachetée par son concurrent, le britannique Air Livery. Pour l'ex-responsable et fondateur d'ATE, Robert Wasilevski, ce rachat "permettra d'augmenter le volume de travail".
"Nous comptions nous développer à Norwich (est de l'Angleterre) mais le site de Châteauroux nous a intéressés pour y peindre des avions bicouloirs. Idéalement placé au centre de la France, il va notamment nous aider dans la commande de 58 avions à peindre que nous avons signée avec la Lufthansa. Une autre compagnie a aussi été signée pour 60 avions", explique Christian Lalane, directeur général d'ATE.
Avec l'acquisition d'ATE, Air Livery (250 salariés), contrôlée par l'indien Air Works, compte désormais 17 salles de peinture, dont sept en France, le reste étant réparti entre l'Angleterre, la Slovaquie et l'Inde.
"Nous avons l'outil industriel pour répondre aux gros appels d'offres des compagnies. Aucune entreprise privée n'a des installations comparables en Europe", assure M. Lalane.
"Depuis le 23 janvier, nous recrutons. Dans un futur proche, on projette de doubler le nombre d'emplois, avec pour 2013 une augmentation de plus de 50% de la production", ajoute-t-il. ATE peint chaque année près de 200 appareils, dont 70 sur le site de Châteauroux, pour un chiffre d'affaires annuel de 14 millions d'euros.
Christian Foucher, directeur du site de Châteauroux, gère le recrutement : "Il n'y a pas de formation de peintre aéronautique. Nous nous tournons donc vers les carrossiers automobiles et la main d'oeuvre du BTP pour les opérations de surface".
Outre les constructeurs, les clients d'ATE sont aussi bien des compagnies aériennes, des loueurs d'avions que des petites sociétés privées. M. Foucher se souvient tout particulièrement d'une commande : "Nous avons repeint aux couleurs bleu et jaune les dix avions de la patrouille suisse d'acrobatie Apache-Breitling. Un travail de haute précision avec beaucoup de détails".