Le Parlement chypriote va examiner une version amendée d'une loi sur les privatisations rejetée jeudi, dont l'adoption est cruciale pour le versement d'une nouvelle tranche de l'aide internationale obtenue il y a un an, a annoncé vendredi le gouvernement.
Les députés doivent se réunir mardi en session extraordinaire pour débattre du texte amendé, a indiqué la radio publique.
Selon le gouvernement, la loi doit être adoptée avant mercredi afin de remplir les conditions imposées par les bailleurs internationaux pour le versement d'une nouvelle tranche d'aide de 236 millions d'euros.
Au bord de la faillite, l'île méditerranéenne avait obtenu en mars 2013 un plan de sauvetage international de 10 milliards d'euros auprès de la troïka (Banque centrale européenne, Commission européenne, Fonds monétaire international) assorti de conditions draconiennes, dont la privatisation des principaux services publics.
"La nouvelle loi présentée par le gouvernement aujourd'hui (vendredi) incorpore de nombreux amendements qui ont été discutés (avec les parlementaires) (...), nous espérons donc un vote en sa faveur", a annoncé le porte-parole du gouvernement, Christos Stylianides.
Jeudi soir, 25 députés avaient voté en faveur du projet, 25 contre et cinq s'étaient abstenus.
Les cinq abstentionnistes sont des membres du parti de centre-droit Diko, mais la formation a fait savoir vendredi qu'elle voterait en faveur du texte remanié.
"Nous sommes très heureux que le gouvernement ait finalement accepté le plus important de nos amendements, ce qui permet(tra) l'adoption du projet de loi", a indiqué dans un communiqué le patron de Diko, Nicos Papadopoulos.
M. Stylianides avait affirmé plus tôt que les amendements garantissaient les droits des travailleurs des entreprises privatisées.
Le ministre des Finances Haris Georgiades a affirmé pour sa part que tout était entrepris pour s'assurer le versement de la prochaine tranche du prêt.
"Nous devons tous comprendre que si nous sombrons, nous sombrerons tous ensemble. Mais si nous redressons la barre, nous pouvons y arriver", a-t-il dit à la presse.
Pour M. Stylianides, il s'agit de ne pas mettre en jeu la crédibilité de l'île face aux bailleurs internationaux, d'autant que ces incertitudes parlementaires se doublent d'une crise au sein du gouvernement.
- Prochain remaniement ministériel -
Jeudi, quatre ministres de Diko ont démissionné pour affirmer leur désaccord sur les termes de la reprise des pourparlers avec la partie nord de l'île, occupée par la Turquie.
Et vendredi, c'est le gouvernement dans son ensemble qui a démissionné pour permettre au président de droite Nicos Anastasiades de procéder à un remaniement plus large. M. Anastasiades a cependant demandé aux ministre de rester à leur poste au moins jusqu'au 15 mars.
Le président, qui avait récemment estimé que Chypre était sur la voie d'un "miracle économique" après le désastre de l'année passée, s'est dit "déterminé à garder le pays sur la voie de la stabilisation et de la guérison".
La semaine a été marquée par des grèves des salariés des compagnies de l'électricité (EAC), des Télécoms (Cyta) et de l'Autorité des Ports, les trois compagnies qui doivent être privatisées.
Les employés d'EAC avaient notamment fait grève mercredi, entraînant des coupures de courant.
Jeudi, avant le vote, des centaines de salariés de ces entreprises avaient manifesté devant le Parlement alors que quelque 200 policiers anti-émeutes gardaient les abords du Parlement.
Des heurts avaient eu lieu lundi à ce même endroit entre manifestants et policiers.
Les employés des trois entreprises concernées craignent des licenciements alors que le chômage atteint des sommets dans l'île. La Commission européenne prévoit un taux de 19,2% pour 2014, contre 16% pour 2013.
"Les droits des travailleurs sont protégés, comme ils le sont déjà pour toutes les organisations para gouvernementales engagées sur le chemin de la privatisation", a tenté de rassurer M. Stylianides.
Alors que son économie est en berne, Chypre a cependant fait état vendredi de chiffres encourageants dans le secteur touristique. Ses recettes ont augmenté de 8% en 2013, pourtant une année noire, selon des chiffres officiels.
Avec 2,08 milliards d'euros, il s'agit des revenus les plus importants depuis plus d'une décennie.
Cette hausse suscite l'espoir que le secteur, vital pour l'économie de l'île, peut aider Chypre à sortir de la récession.