Des filiales d'Uber ont été assignées en référé devant le tribunal de commerce de Paris par des sociétés de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC) qui, soutenues par au moins un syndicat de taxis, s'estiment victimes de "concurrence déloyale", a-t-on appris lundi auprès de protagonistes du dossier.
"LeCab", nom commercial de la société Voxtur, ainsi que les filiales du groupe Transdev "Greentomatocars" et "Transdev Shuttle France", ont obtenu la convocation le 21 novembre des sociétés Uber France et Uber BV (basée aux Pays-Bas) devant le tribunal, selon des documents judiciaires.
Rare concordance de vues entre les VTC et les taxis, deux secteurs qui ont connu des frictions ces derniers mois, la Chambre syndicale des artisans du taxi (CSAT) de Paris a annoncé à l'AFP qu'elle s'associait à cette action. De source proche du dossier, d'autres représentants des taxis devraient emboîter le pas à la CSAT.
Il s'agit d'empêcher Uber de poursuivre son activité "UberPOP" de mise en relation payante de passagers et d'automobilistes. Uber France a été condamné le 16 octobre par le tribunal correctionnel de Paris à 100.000 euros d'amende pour avoir présenté UberPOP comme du covoiturage.
Le code des Transports, depuis une loi promulguée le 1er octobre, punit de deux ans de prison et 300.000 euros d'amende le fait de mettre en relation des clients et des chauffeurs sans habilitation.
Mais Uber a fait appel du jugement et ce dernier est suspensif. Les sociétés VTC requérantes disent redouter que la poursuite d'UberPOP d'ici au jugement d'appel ne soit préjudiciable à leur propre activité, car les tarifs d'UberPOP sont plus bas. Par exemple, contrairement à des chauffeurs VTC professionnels, les chauffeurs UberPOP, simples particuliers, n'ont pas à suivre une formation de 250 heures.
"Les requérantes sont des sociétés récentes qui, contrairement à Uber, se conforment aux règles applicables du secteur (...) elles ne peuvent demeurer compétitives face à une entreprise qui viole la loi", expliquent ces dernières, en arguant que "le non-respect de la règlementation constitue un acte de concurrence déloyale".
Elles appellent à faire "cesser au plus vite" les activités d'UberPOP et demandent au tribunal de commerce d'imposer une astreinte en cas de non-exécution qui, "pour être dissuasive, ne saurait être inférieure à 250.000 euros par jour".
"On a décidé de se joindre à ce référé", a déclaré à l'AFP Christian Delomel, président de la CSAT Paris. "Uber continue à proposer ce genre de transport" UberPOP bien qu'il ait été condamné, et persiste à proposer "du prix au kilomètre, ce qui est formellement interdit, puisque le VTC ne fonctionne qu'au forfait", a développé M. Delomel.
"Nous, en règle générale, on n'est pas contre les VTC, on est contre les VTC qui font mal leur travail et surtout ceux qui enfreignent la loi. Le taxi est un secteur très réglementé, pour une fois que certains VTC qui disent +on veut appliquer la réglementation+, on applaudit des deux mains", a ajouté le dirigeant de la CSAT.
Réagissant sur son blog officiel, Uber a dit prendre acte de l'assignation, promis de défendre "vigoureusement ses intérêts et ceux de ses utilisateurs" et affirmé qu'"une décision à l'encontre d'UberPOP viendrait mettre en danger la mobilité partagée dans son ensemble".