par Joshua Franklin
ZURICH (Reuters) - Credit Suisse Group a annoncé mercredi une refonte d'ampleur de sa stratégie et compte pour cela lever six milliards de francs (5,5 milliards d'euros) de capitaux frais, initiatives qui marquent sa reprise en main par Tidjane Thiam, son directeur général en poste depuis juillet.
Ce dernier a également remanié l'équipe de direction et précisé vouloir introduire en Bourse une partie du capital des activités bancaires en Suisse.
Sa stratégie vise à mettre l'accent sur la gestion de fortune et la croissance en Asie, tout en réduisant le poids - et les besoins de fonds propres - de la banque d'investissement.
La deuxième banque suisse fait en la matière le même choix que sa grande rivale UBS et plusieurs autres acteurs du secteur, tirant les conclusions du durcissement de la régulation depuis la crise financière, qui pèse sur la rentabilité de la banque d'investissement.
Les résultats financiers de Credit Suisse du troisième trimestre, inférieurs aux attentes du marché et que Tidjane Thiam a jugés "pas très bons", soulignent le besoin de changement du groupe.
Le bénéfice imposable trimestriel a reculé de 34% à 861 millions de francs alors que les analystes attendaient en moyenne 1,2 milliard.
"Cela devrait, d'une certaine manière, valider la stratégie et cela confirme certaines des idées qui nous ont guidés vers cette stratégie", a déclaré le directeur général lors d'une conférence de presse. "L'ambition de cette stratégie est fondamentalement de croître. Croître et résoudre pour de bon la question des capitaux."
Le bilan de Credit Suisse est moins solide que celui de ses principaux concurrents et constitue depuis longtemps un motif de préoccupation pour certains investisseurs.
Tidjane Thiam a précisé vouloir réduire les coûts annuels de deux milliards de francs d'ici la fin 2018.
LE TITRE BAISSE MAIS LES COMMENTAIRES SONT POSITIFS
Si l'action du groupe perdait plus de 5% vers 8h00 GMT, les analystes émettent des jugements favorables sur la nouvelle stratégie.
"Au final, nous considérons les annonces comme positives", résume Jernej Omahen, de Goldman Sachs, précisant que le montant des augmentations de capital est conforme aux attentes, que les objectifs de réduction des coûts sont crédibles et que le projet de mise en Bourse de la branche suisse est une bonne surprise.
La reprise en main de Credit Suisse s'illustre aussi par les changements de personnes annoncés mercredi: Pierre-Olivier Bouée, Iqbal Khan et Lara Warner figurent parmi les promus au comité exécutif du groupe, tandis que Gaël de Boissard, Hans-Ulrich Meister et Robert Shafir, entre autres, quittent l'équipe de direction.
Parallèlement, la banque prévoit de supprimer 1.600 postes en Suisse au cours des trois ans à venir et de réduire ses effectifs à Londres, a expliqué le directeur général.
Il a précisé que 1.800 des postes basés à Londres n'avaient pas besoin d'y demeurer, la capitale britannique étant une localisation particulièrement coûteuse.
Les deux appels au marché prévus doivent se faire sous la forme d'un placement privé de 1,35 milliard de francs et d'une augmentation de capital par émission de droits de souscription pour environ 4,7 milliards. Une assemblée générale extraordinaire est prévue le 19 novembre.
Les estimations des analystes en matière de besoins de capitaux s'échelonnaient de cinq à dix milliards de francs.
Tidjane Thiam a précisé que l'augmentation du capital devrait porter le ratio de fonds propres proforma à 12,2% et qu'il devrait rester durablement au-dessus de 12%.
"Le renforcement de notre situation de capital nous permettra de maîtriser notre propre destin et de bâtir une stratégie visant à faire de Credit Suisse un leader incontesté de la banque privée et de la gestion de fortune", a-t-il dit.
La nouvelle stratégie passe aussi par la création de trois grandes divisions géographiques (la banque universelle en Suisse, l'Asie-Pacifique et la gestion de fortune à l'international) et deux divisions de banque d'investissement (marchés mondiaux d'une part, banque d'investissement et marchés de capitaux d'autre part).
(Marc Angrand pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)