Les députés ont entamé lundi soir l'examen du projet de budget rectificatif 2014 en adoptant sa mesure phare, une réduction d'impôt sur le revenu pour les ménages les plus modestes.
3,7 millions de foyers fiscaux vont bénéficier d'une réduction d'impôt dès la rentrée de septembre, dont 1,9 million en seront totalement exonérés.
Cette mesure concerne les personnes dont le revenu va jusqu'à 1,1 fois le Smic. Une personne seule paiera 350 euros d'impôts de moins, un couple 700 euros.
Il s'agit pour le gouvernement de faire sortir du barème de l'impôt sur le revenu ceux qui y étaient entrés en 2012 et 2013 ou qui y seraient rentrés cette année en raison de sa politique fiscale et non parce que leurs revenus ont augmenté.
La mesure représente un coût de 1,16 milliard d'euros, financé par la lutte contre la fraude fiscale.
L'UMP a critiqué une réduction d'impôt qui ne touchera pas les classes moyennes.
"C'est une mesure insuffisante, mal calibrée, injuste (...) les classes moyennes vont avoir la gueule de bois en septembre", a prédit le président de la commission des Finances, l'UMP Gilles Carrez .
Les députés examinent jusque mercredi soir ce projet de budget rectificatif qui met en œuvre certaines orientations du pacte de responsabilité contesté par une partie des députés socialistes, appelés à "la loyauté" dimanche par Manuel Valls.
"C’est dans la cohérence et dans la continuité que se joue la solidité, et en fin de compte, la réussite de notre politique", a lancé le ministre des Finances Michel Sapin à l'adresse de sa majorité à l'ouverture des débats lundi.
D'ici à mi-juillet, le Parlement va être amené à adopter d'une part le projet de loi de finances rectificatif (PLFR) et d'autre part le budget rectificatif de la Sécurité sociale (exonération de cotisations sociales, gel de prestations, etc).
Ces deux textes sont les premiers à mettre en oeuvre le pacte de responsabilité et solidarité annoncé par François Hollande (qui atteindra 40 milliards d'aides aux entreprises et 5 mds pour les ménages en 2017), financé par 50 milliards d'économies d'ici à la fin du quinquennat.
Le PLFR prévoit quatre milliards d'économies, dont 1,6 milliard du budget de l'Etat, afin de poursuivre la réduction du déficit public à 3,8% du PIB.
Le gouvernement va y ajouter un amendement pour y introduire le successeur de l'écotaxe, le "péage de transit" prévu pour les poids lourds.
En commission, les socialistes ont fait voter la suppression du gel des aides personnelles au logement prévue dans le projet de loi. Le gouvernement s'y est montré ouvert, à condition que le coût (130 millions d'euros en année pleine) soit compensé par de nouvelles économies.
Les députés ont également décidé de reconduire pour un an l'exonération de taxe d'habitation et de redevance audiovisuelle pour environ 250.000 contribuables modestes (pour un coût de 45 millions d'euros).
Mais la politique du gouvernement favorable aux entreprises et son corollaire d'économies passent toujours mal dans une partie de la gauche, jusqu'à certains socialistes, notamment les 41 abstentionnistes sur le programme de stabilité budgétaire.
Ces "frondeurs" s'inquiètent notamment de l'impact récessif du gel de certaines prestations sociales.
Ils ont déposé une quinzaine d'amendements, notamment pour poser des conditions au crédit d’impôt compétitivité emploi (Cice), s'attirant les foudres de leur président de groupe, Bruno Le Roux.
"Je n’accepte pas qu’il y ait une petite partie de députés qui décident de s'exonérer de toutes nos règles de fonctionnement", a-t-il encore dénoncé lundi.
A gauche, les écologistes et le Front de gauche espèrent cependant des "convergences" sur des amendements avec certains de ces frondeurs.
Une abstention massive dans les rangs socialistes semble cependant peu probable, tant le vote des budgets signe l'appartenance à une majorité.
Le premier couac n'est cependant pas venu d'un frondeur mais de la député socialiste Karine Berger qui a fait voter un amendement contre l'avis du gouvernement modifiant non pas le solde nominal du déficit (3,8% du PIB) mais sa répartition entre déficit "structurel" (conséquence des politiques menées) et déficit "conjoncturel".
Estimant que la réduction plus lente que prévue des déficits n'est pas liée à la politique du gouvernement mais à la dégradation de la conjoncture, Mme Berger a fait voter un amendement mettant à 1,9% au lieu de 2,3% ce déficit structurel.
Le gouvernement, qui estime que cette modification n'est pas étayée, se réserve le droit de demander une seconde délibération à la fin des débats, a indiqué le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert.