Les magasins de bricolage pourront ouvrir le dimanche en toute légalité après la publication d'un nouveau décret les autorisant à déroger au repos dominical de manière permanente, mais les syndicats entendent poursuivre leur combat en déposant un nouveau recours auprès du Conseil d'Etat.
Le Journal officiel a publié samedi le décret du ministère du Travail autorisant les commerces de détail de bricolage à ouvrir le dimanche en dérogation de droit au repos dominical sans limite de temps.
Dès la publication du décret, des syndicats du commerce ont annoncé qu'ils déposeraient un nouveau recours devant le Conseil d'Etat.
Pour sa part, Jean-Claude Bourrelier, PDG de Bricorama, s'est dit "heureux et soulagé" de la parution du décret. C'est la CGT de Bricorama qui avait ouvert le conflit en saisissant la justice contre le travail dominical.
- Retour à une concurrence normale pour Bricorama -
Le décret ajoute "les commerces de détail du bricolage à la liste des catégories d’établissements bénéficiant d’une dérogation de droit en matière de repos dominical en application de l’article L. 3132-12 du code du travail".
Il abroge le décret du 30 décembre 2013 qui avait inscrit de manière temporaire, jusqu'à une nouvelle loi, les commerces de détail et de bricolage sur la liste des établissements pouvant ouvrir le dimanche.
Le 12 février, la plus haute juridiction administrative, le Conseil d'Etat, saisi par plusieurs syndicats, avait estimé qu'il "existait un doute sérieux sur la légalité" du décret du 30 décembre autorisant temporairement l'ouverture dominicale et suspendu son application.
En effet, pour le Conseil d’État, "une telle dérogation doit normalement avoir un caractère permanent, dans la mesure où elle a vocation à satisfaire des besoins pérennes du public". "Le souci d'apaiser la situation" dans l'attente d'un nouveau cadre législatif n'était pas, selon lui, un motif justifiant une dérogation.
Après ce revers, Jean-Marc Ayrault avait promis que le problème serait réglé dans les jours suivants et qu'un nouveau décret serait publié pour remplacer celui annulé par le Conseil d’État "pour des raisons uniquement de forme".
Malgré la suspension du décret, les magasins avaient continué à ouvrir le dimanche.
Le décret va permettre que "la concurrence redevienne normale", a estimé le PDG de Bricorama. "C'était complètement incroyable que Bricorama, depuis deux ans, ait fermé [le dimanche] alors que ses gros concurrents, eux, restaient ouverts", a ajouté le PDG.
"Je ne vois pas pourquoi il y avait réticence puisqu'un décret autorise l'ameublement et le jardinage à être ouvert le dimanche, s'est-il interrogé.
- Mais les syndicats vont demander une suspension -
Mais, le syndicat du commerce Seci-Unsa et la CGT ont d'ores et déjà indiqué qu'ils demanderaient un référé de suspension du décret puis un recours au fond demandant son annulation. Reprenant les arguments du Conseil d'Etat, ils justifient leur démarche par le fait que l'ouverture des magasins de bricolage ne vise pas à satisfaire "des besoins pérennes" et viole la loi garantissant le droit au repos dominical.
Selon Eric Scherrer, délégué représentant de Seci-Unsa, "le Conseil d'Etat ne s'est pas contenté, contrairement à ce que dit le gouvernement, de suspendre sur le fait que le décret était à durée provisoire". "Le Conseil d'Etat a répondu aussi au fond en expliquant que ce type de décret devait correspondre notamment à une demande nécessaire au fonctionnement de la société", a-t-il assuré. "Or il a conclu que ça ne correspondait pas à une demande nécessaire", selon Eric Scherrer.
Pour Karl Ghazi, délégué CGT, "le conseil dit que le repos dominical est le jour de repos commun garanti par les traités internationaux par la constitution et par la loi et que pour déroger à ce repos commun il faut des besoins pérennes".
"Le gouvernement est dans une impasse et cherche à s'en sortir par tous les moyens", juge-t-il. Selon lui, "on est dans une démarche de généralisation de l'ouverture des magasins de bricolage et autres".