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Les Chypriotes comptent sur l'Eglise pour éviter la faillite

Publié le 24/03/2013 14:35

"Si elle le veut, l'Eglise peut sauver Chypre", assure Panos, un fidèle endimanché, à la sortie de la messe dominicale dans une église de Nicosie, en référence à l'important patrimoine dont dispose l'Eglise orthodoxe de Chypre.

Le chef de l'Eglise orthodoxe de Chypre, Chrysostomos II, a annoncé mercredi mettre "la totalité du patrimoine de l'église à la disposition de ce pays pour l'empêcher de s'effondrer".

Ces biens pourraient être hypothéqués, pour aider le gouvernement à trouver les 5,8 milliards d'euros que les bailleurs de fonds lui ont demandé de mettre sur la table en échange d'un prêt de 10 milliards d'euros destiné à sauver l'île de la faillite.

"Nous sommes tournés vers Dieu, et personne d'autre. Nous avons tous été touchés, mais pour notre pays nous donnerons ce que nous pouvons", dit Elpiniki Loïzou, sur les marches de l'église Saint-Mamas, à la périphérie de Nicosie, où les fidèles se pressent pour faire bénir leurs icônes.

"On ne s'attend pas à ce que Dieu nous sauve de tout ça --mais l'Eglise, elle, peut nous aider, en contribuant financièrement et en faisant du lobby auprès d'autres institutions religieuses", indique de son côté Georges Nicolaïdes, un autre fidèle.

"Il est temps que l'Eglise redonne peu à peu tous ses biens au peuple", estime-t-il, rappelant que si elle est riche actuellement c'est notamment "parce que sous les Ottomans, c'est elle qui était chargée de collecter l'impôt".

En proposant les biens de l'Eglise, l'archevêque a estimé leur valeur à plusieurs dizaines de millions d'euros, sans plus de précision.

Mi-mars, l'archevêque avait évoqué dans la presse un patrimoine de près de 250 millions d'euros --mais difficile d'évaluer la richesse réelle de l'Eglise, qui pourrait être bien supérieure.

L'Eglise orthodoxe chypriote est le plus important propriétaire foncier de l'île. Elle possède des hôtels et d'importantes participations dans des sociétés chypriotes de premier plan, telles que la banque Hellenic Bank, dont elle est l'actionnaire principal avec 30% des parts, ou la marque de bière nationale Keo (20%), qui commercialise aussi vin et eau.

En septembre, face à la crise, elle avait dû se résoudre à amputer de 15 à 25% les salaires des évêques, des prêtres et des laïcs, tout en épargnant ceux qui touchaient 1.500 euros par mois ou moins.

"L'archevêque est avant tout un homme d'affaires", déplore un fidèle, Costas Michaïl, l'accusant de "travailler pour son intérêt personnel et celui de l'Eglise, pas pour le peuple".

Chrysostomos II a plusieurs fois pris la défense des banques, face aux critiques des autorités chypriotes, ou des bailleurs de fonds internationaux.

En janvier, le président d'alors, le communiste Demetris Christofias, avait estimé que "le primat de l'Eglise ne peut être exclu de ce groupe d'entrepreneurs et de banquiers" qu'il accusait d'être responsables de la crise.

Cela n'avait pas empêché l'ex-président de faire appel au dignitaire pour une médiation avec Moscou, auprès de qui il tentait d'obtenir un nouveau prêt, pour éviter de devoir faire appel au mécanisme de solidarité européen.

Car l'Eglise de Chypre, autocéphale, entretient des liens étroits avec l'Eglise orthodoxe russe.

Et l'archevêque, qui historiquement était le chef de file politique de la communauté grecque chypriote lors des trois siècles de domination ottomane, a gardé un rôle politique majeur.

Il est consulté pour les grandes décisions et mercredi, dès le début de la crise, Chrysostomos II était reçu par le président Nicos Anastasiades qui l'a de nouveau sollicité pour faciliter les négociations avec Moscou, auprès de qui Chypre espérait obtenir les fonds manquants pour boucler un plan de sauvetage européen.

Nationaliste, il a réitéré dans un entretien au quotidien Realnews à Athènes, que selon lui, la solution passait par une sortie de l'euro.

Mais dimanche, sur le perron de Saint-Mamas, un ermite très vénéré à Chypre et connu pour avoir refusé de payer des impôts aux autorités byzantines, le débat fait rage entre ceux qui veulent rester dans l'euro et les autres.

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