Plages, vieilles pierres et ... frisson révolutionnaire : l'Egypte et la Tunisie ont décidé de transformer leur récent changement de régime en argument publicitaire pour faire revenir les touristes.
Au salon international du tourisme de Berlin, le plus important du monde, l'Egypte n'a pas attendu d'être à l'an prochain, où elle sera l'invitée d'honneur, pour voir grand et tripler sa superficie d'exposition.
Et sur les stands du salon, qui a lieu jusqu'à dimanche, les bustes de Pharaons voisinent ainsi avec des reproductions de la place Tahrir du Caire, foyer de la révolution, sous un slogan commun: "Venez voir l'endroit où tout a commencé".
Quelques halls plus loin, la Tunisie se présente comme "l'endroit où il faut être, maintenant", alors que les tours opérateurs ne reprennent que timidement leurs dessertes, et que les touristes lui préfèrent l'Europe méridionale.
"Je viens proposer au peuple allemand de vivre l'émotion en Tunisie" avant que le pays ne devienne "une démocratie classique", vante le ministre tunisien du Tourisme, Mehdi Houas, au cours d'une conférence de presse.
"Cet électrochoc (qu'a été la révolution pacifique) va permettre à une nouvelle frange de touristes de venir", assure-t-il, tablant sur un tourisme "citoyen et culturel".
Soulignant qu'"avant, les touristes étaient parqués sur les plages et tenus éloignés de la réalité", M. Houas affirme qu'il veut désormais créer "de nouvelles infrastructures", hors des stations balnéaires.
La plage et le soleil vont toutefois "rester la colone vertébrale" de l'offre tunisienne, a reconnu le directeur général de l'Office du tourisme de ce pays, Habib Ammar.
Chez le voisin égyptien, le ton est le même.
"L'Egypte était déjà incontournable pour son histoire et ses richesses naturelles, mais il y a un nouvel élément. Nous invitons les touristes à partager l'expérience de la révolution démocratique", explique à l'AFP Hisham Zaazou, premier assistant du ministre égyptien du Tourisme.
"Les valeurs de la révolution sont des valeurs européennes. Si les Européens veulent aider l'Egypte, qu'ils viennent nous voir", dit-il encore.
Les professionnels, eux, se sont déjà adaptés.
"La place Tahrir était déjà incontournable car c'est là que se trouve le Musée Egyptien. Mais désormais les guides montrent aussi les endroits où les manifestants ont monté des tentes et racontent comment des partisans de l'ancien régime ont chargé à dos de chameaux", explique à l'AFP Mahmoud Zekri, du tour opérateur Zekri Tours.
Malgré l'offensive marketing, les deux pays ne se font guère d'illusions pour l'année 2011 : la Tunisie a accusé une baisse de fréquentation touristique de 45% en début d'année, tandis que l'Egyptien Hisham Zaazou ne prévoit de normalisation "qu'à partir de l'été".
Mohamed Abdo, organisateur de croisières sur le Nil, affirme même qu'"il est trop tôt pour faire revenir les touristes, le pays n'est pas encore stabilisé".
Une opinion partagée par la compagnie italienne Costa Croisières, leader européen du secteur, qui a annoncé mercredi l'annulation de toutes les escales prévues en Egypte et Tunisie en 2011.
"L'Egypte est sûre", affirme au contraire M. Zaazou, tandis que M. Houas assure qu'en Tunisie "la sécurité est totale".