Le retrait massif des banques, sous la pression des nouvelles contraintes réglementaires, pousse un nombre croissant de collectivités locales à emprunter sur les marchés voire à s'adresser directement aux épargnants.
Depuis le début de l'année, les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur, Rhône-Alpes et Pays de la Loire ont émis des obligations vendues à des investisseurs, de même que le département de l'Essonne.
Quant à la ville de Marseille, elle prépare le premier emprunt obligataire de son histoire, pour environ 150 millions d'euros.
Par comparaison, en 2011, seules trois collectivités locales françaises avaient ainsi fait appel directement aux marchés.
"Nous sommes très sollicités par les collectivités locales pour réfléchir à des financements de diversification et leur apporter un accès au marché obligataire au moins une fois dans l'année", explique Alain Gallois, responsable monde de la plate-forme dette chez Natixis.
Elles y sont poussées par l'assèchement du crédit bancaire, devenu manifeste en 2011 avec le retrait de beaucoup d'établissements, notamment Dexia, mastodonte qui pesait encore près de 40% du marché en 2008.
"Ce sont les collectivités locales qui posent désormais le plus de problèmes en termes de financement", a reconnu mercredi le président de la Fédération bancaire française (FBF), Frédéric Oudéa.
Pour justifier leur désengagement, les banques évoquent l'entrée en vigueur du nouveau cadre réglementaire dit Bâle III, début 2013, qui dissuade fortement les prêts à très long terme, dont les collectivités sont friandes.
Quant à celles qui acceptent encore de prêter, elles le font à des conditions devenues prohibitives.
Lors de son dernier appel d'offres auprès des banques, fin 2011, le conseil régional des Pays de la Loire a reçu des propositions avec des marges "complètement délirantes", rapporte le secrétaire général, Simon Munsch.
Face à ce durcissement, le marché obligataire offre désormais une alternative, mais aussi des conditions financières plus avantageuses.
"Beaucoup hésitaient à franchir le pas tant qu'il n'y avait pas de bénéfice de coût. Mais aujourd'hui, la différence est substantielle", analyse Jérôme Pellet, directeur au sein du département marchés de dette chez HSBC France.
Les collectivités se pressent d'autant plus au guichet que, depuis le début de l'année, les investisseurs ont montré de l'appétit pour ces emprunts dont le risque est très faible.
Les investisseurs allemands, en particulier, sont très amateurs de dette française mais, par le passé, l'Essonne a déjà sollicité l'Asie via une opération en dollars de Hong Kong (avec des instruments couvrant le risque de change).
Pour diversifier leurs sources de financement, certaines collectivités se tournent directement vers les épargnants. Les Pays de la Loire, qui avaient été la première collectivité française à se lancer sur ce terrain en 2009, envisagent d'y recourir de nouveau cette année.
Rapidement, l'élan autour du marché obligataire devrait faire passer le nombre des émetteurs de 7 ou 8 à 20, prévoit Zeina Bignier, responsable de l'origination pour le secteur public pour Société Générale.
Pour elle, "nous pourrions atteindre une petite trentaine" à moyen terme, représentant l'ensemble des collectivités locales bénéficiant de la taille critique permettant d'accéder au marché obligataire.
A 15 ou 20 millions d'euros le montant minimum d'émission, selon M. Pellet, la grande majorité des collectivités françaises resteront donc sur la touche.
Celles-là compteront sur l'arrivée de la nouvelle banque des collectivités lancée par la Banque Postale et la Caisse des dépôts, ainsi que sur l'agence de financement des collectivités locales, qui ne verra sans doute pas le jour avant 2013.