"L'aventure enthousiasmante" d'une candidature de la France pour l'exposition universelle de 2025 peut réussir, assure un rapport parlementaire rendu public mercredi, mais le pays devra négocier avec un jeu doté d'atouts et de quelques handicaps.
Les députés Jean-Christophe Fromantin (UDI), promoteur de cette idée depuis 2011 et président de la mission parlementaire, et Bruno Le Roux (PS), rapporteur, ont remis au président de l'Assemblée Claude Bartolone un document riche d'une centaine d'auditions, adopté à l'unanimité.
La mission était "de nous faire reprendre souffle et retrouver le goût du rayonnement", a déclaré M. Bartolone, fervent partisan de la candidature française. Ce serait une "exposition pour faire du bien à la France... Il ne faut pas en faire une martingale mais ce serait un moyen de réconcilier la France avec elle-même", a renchéri M. Le Roux. La France n'a pas accueilli d'Expo depuis 1900.
Le consensus politique semble déjà acquis, soutenu par le monde économique qui y voit un levier de développement. Forts de ce socle, les députés listent des recommandations "indispensables" pour passer d'une idée à un "projet gagnant".
Au niveau institutionnel, le déroulé ne doit souffrir d'aucun accroc et François Hollande devra s'investir pour que le dépôt de la candidature intervienne dès 2016. Le rapport sera d'ailleurs présenté "en novembre" au président de la République. Le choix du Bureau international des expositions (BIE) interviendra en 2019 au plus tard.
La population aussi, qui devra être sensibilisée à l'accueil, encouragée au volontariat et à la pratique de langues étrangères. "Si ce n'est pas tout un pays qui a envie, on aura peu de chance de l'emporter", a insisté M. Fromantin.
Concrètement, la réalisation "avant 2025" du métro automatique Grand Paris Express et des dessertes des aéroports Roissy et Orly devra être assurée. Le Premier ministre a certes donné des gages le 13 octobre, mais une candidature rendrait la date-butoir obligatoire. Sinon comment accueillir les 50 millions de visiteurs envisagés ?
Le projet est audacieux car il envisage de "renouveler" en profondeur le modèle classique de l'Expo universelle basé sur un lieu unique et des pavillons nationaux. Cette fois, les pays invités auraient à leur disposition les abords d'un site ou monument célèbre, les gares du Grand Paris et du Grand Paris Express; atténuant ainsi les disparités entre pays pauvres et fortunés dans leur capacité d'exposition.
De même, le modèle économique de dépenses publiques pharaoniques (le coût de l'Expo pourrait dépasser 6 milliards d'euros à Dubaï en 2020) serait revu au profit d'un emprunt obligataire garanti par l'Etat, assorti de financement participatif et de mécénat d'entreprises.
- L'arrogance française -
Pour convaincre le BIE, la France possède de sérieux atouts comme "sa compétence incontestable en matière d'organisation de grands événements internationaux". "Depuis 22 ans, à l'exception des JO d'été, la France a accueilli tous les grands événements sportifs mondiaux ou européens possibles", sans compter chaque année le Tour de France, le Festival de Cannes, souligne le rapport.
Elle est aussi capable d'assurer le niveau de sécurité attendu pour un tel événement et peut se prévaloir d'une adhésion déjà forte.
En revanche, la France devra gommer des handicaps qui ne manqueront pas d'être exploités par ses futurs concurrents. La bataille risque d'être sévère, les pays émergents étant de plus en plus intéressés par l'Expo, Brésil en tête.
Ainsi, la réputation d'"arrogance" pourrait peser: la France doit "se départir d'une forme de condescendance", souligne Jean-Pierre Lafon, ambassadeur de France et président honoraire du BIE. Surtout quand il faudra convaincre suffisamment de pays parmi les 168 membres du BIE pour l'emporter.
De plus, la France traîne un contentieux avec le BIE pour avoir annulé par deux fois l'organisation d'une Expo universelle. Celle prévue pour 1989 avait été abandonnée en raison de désaccords entre le président François Mitterrand et Jacques Chirac, à l'époque maire de Paris.
La France s'était aussi désengagée "de manière cavalière" pour celle de 2004 qui devait avoir lieu en Seine-Saint-Denis. Enfin, la France avait vraiment tardé à donner sa réponse aux Coréens pour l'expo spécialisée de Yeosu en 2012.
La France devra aussi faire face à un défi commun à tous les candidats: le thème et le contenu à trouver.