Le bras de fer continue entre l'Union européenne et l'Argentine et a monté d'un cran vendredi avec la saisine par Bruxelles de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC) pour demander la levée des restrictions aux importations imposées par l'Argentine, "qui nuisent au commerce et aux investissements de l'UE".
Le commissaire européen au Commerce, Karel De Gucht, avait promis début mai qu'il agirait pour protester contre l'initiative du gouvernement argentin d'exproprier le groupe pétrolier espagnol Repsol de sa filiale argentine YPF, et avait alors déploré "la tendance croissante au protectionnisme de l'Argentine".
"Les restrictions aux importations imposées par l'Argentine enfreignent les règles du commerce international et doivent être levées", a déclaré M. De Gucht vendredi au cours d'une conférence de presse. Il a dénoncé "un régime d'importations protectionniste" qui "empire".
"Il ne s'agit pas d'une querelle entre l'Europe et un de ses partenaires commerciaux", a dit M. De Gucht, soulignant que "l'Europe n'est pas une voix isolée" et que 19 membres de l'OMC ont fait part de leurs préoccupations.
"Nos partenaires sont les bienvenus s'ils se joignent à notre action dans les prochains jours ou les prochaines semaines", a-t-il dit.
Dans un premier temps, l'UE demande que des consultations soient organisées avec l'Argentine, mais si aucune solution n'est trouvée dans un délai de 60 jours, elle pourra demander à l'OMC de mettre en place un panel spécial chargé de trancher, précise la Commission dans un communiqué. Ce genre de contentieux devant l'OMC peut durer plusieurs années.
Les restrictions à l'importation imposées par l'Argentine concernent toutes sortes de biens, "des voitures aux ordinateurs en passant par les appareils ménagers", a souligné M. De Gucht, et elles sont encore plus sévères depuis février.
Depuis cette date en effet, Buenos Aires impose à tous les biens importés en Argentine un pré-enregistrement et d'une approbation préalable.
L'UE lui reproche également d'imposer à des centaines de marchandises une licence d'importation. "Ces procédures entraînent systématiquement des retards dans les importations ou des refus sans motifs clairs", souligne la Commission.
Par ailleurs, l'Argentine "oblige les importateurs à équilibrer leurs importations par des exportations ou à augmenter le contenu local des produits qu'ils fabriquent en Argentine, ou encore leur interdit de transférer leurs revenus à l'étranger", selon la Commission, qui souligne que "cette pratique non transparente n'est écrite nulle part mais est appliquée systématiquement".
Les relations entre l'UE et l'Argentine se sont crispées depuis que la présidente argentine, Cristina Kirchner, a décidé le 16 avril d'exproprier partiellement la compagnie pétrolière YPF, contrôlée par Repsol à 57,4%, afin que l'Etat et les provinces argentines en prennent le contrôle à 51%.
La Commission précise qu'en 2011, les restrictions en vigueur en Argentine ont porté sur des exportations d'un montant total de 500 millions d'euros environ, mais que l'extension de ces mesures à tous les produits à partir de 2012 porte le montant des échanges concernés à l'ensemble des exportations européennes vers l'Argentine. Celles-ci ont atteint 8,3 milliards d'euros en 2011.
Elle rappelle avoir déjà abordé la question avec Buenos Aires, conjointement avec d'autres partenaires commerciaux, à plusieurs reprises ces dernières années.