Le gouvernement a fait vendredi "ses dernières propositions" sur la SNCF, a averti Emmanuel Macron à propos de la reprise par l'Etat de 35 milliards d'euros de dette du groupe, une annonce qui n'a pas convaincu les syndicats de mettre fin à la grève.
"Il y a des manifestations légitimes contre la réforme de la SNCF. Je dis (aux syndicats) +on est arrivé au bout du processus+. Le texte va arriver au Sénat (mardi). Le gouvernement fait ses dernières propositions aujourd'hui, prend sa responsabilité sur la dette. Nous devons aller au bout de cette réforme, nous irons au bout", a déclaré le président de la République dans un entretien à BFMTV accordé vendredi depuis Saint-Pétersbourg où il est en déplacement.
Aux syndicats qui se sont succédé vendredi matin à Matignon, le Premier ministre, Edouard Philippe, a confirmé que l'Etat reprendrait 35 milliards d'euros de dette, dont 25 milliards en 2020 et 10 milliards en 2022, afin que l'entreprise atteigne "l'équilibre" financier "avant la fin du quinquennat". "Un engagement sans précédent", a-t-il vanté.
"Il n'y aura pas d'impôt SNCF" pour compenser cette reprise de dette, qui "viendra s'ajouter à la dette publique de l'Etat", a-t-il précisé.
En contrepartie et afin de consolider le modèle économique, le Premier ministre a demandé un effort de productivité à la SNCF pour combler son écart de compétitivité estimé à 30% par rapport à ses concurrents. "A l'horizon 2026, l'écart de compétitivité doit être réduit des deux tiers", a-t-il dit.
Le gouvernement veut aussi "alléger le poids des péages ferroviaires" acquittés par les trains circulant sur le réseau SNCF, en limitant la hausse de leurs tarifs "au niveau de l'inflation".
L'Unsa, qui a eu la primeur des annonces gouvernementales, s'est dite "rassurée" par l'"engagement ferme de l'État" sur les finances de la SNCF, par la voix de son secrétaire général Luc Bérille. Et une décision sur une éventuelle sortie de l'Unsa ferroviaire de la grève sera prise "très rapidement", a embrayé son secrétaire général, Roger Dillenseger, avant de préciser à l'AFP que le syndicat réformiste attendrait le vote de la loi au Sénat, le 5 juin, pour "s'interroger" sur "les suites à donner au conflit".
- La grève pour "peser" -
A la CGT Cheminots, "le combat", c'est-à-dire la grève entamée il y a deux mois, continue car "la mobilisation est plus que jamais nécessaire", a insisté son secrétaire général Laurent Brun, même si la tonalité de ses propos a paru plus apaisée que lors de la précédente série de rencontres bilatérales à Matignon le 7 mai.
"Pour résumer, on a un gouvernement qui semble plus ouvert mais qui a toujours du mal à s'engager", a estimé M. Brun qui revendique la tenue d'une "table ronde tripartite (organisations syndicales, patronat, gouvernement, ndlr) pour que le gouvernement fixe ses engagements par écrit vis-à-vis des grévistes". M. Philippe "ne nous a pas dit non" et "nous donnera une réponse très prochainement", a-t-il glissé.
Plus tranché, SUD-Rail n'a vu "guère plus d'avancées" pour les cheminots et "pas de satisfactions" à l'issue de son entretien, "pas de nature à faire cesser la grève", selon son porte-parole Erik Meyer. SUD-Rail réclame le retrait du projet, ainsi que "des négociations tripartites" avec "le patronat du secteur (ferroviaire), le gouvernement et les organisations syndicales" pour étudier "l'ensemble des questions sur l'ouverture à la concurrence, le financement et les garanties sociales du secteur".
A la CFDT aussi, la grève "continue" car "nous avons besoin de la mobilisation pour aller jusqu'au bout" du processus parlementaire, a souligné son secrétaire général, Laurent Berger.
"Dans ce cadre-là, nous allons continuer de peser pour que des amendements soient repris dans le texte de loi" et pour qu'ait lieu une réunion tripartite sur la convention collective nationale du transport ferroviaire, a-t-il détaillé, après avoir "pris note positivement" des annonces sur la reprise de dette. La ministre des Transports Elisabeth Borne s'est par ailleurs dite prête à réunir "mi-juin" les partenaires sociaux au sujet de la convention collective.
Et pour FO Cheminots, "toutes les raisons de la grève sont encore là", a déclaré son secrétaire général François Grasa.
Reçu en clôture de la journée, le patron de la SNCF Guillaume Pépy a loué des "avancées financières historiques".
"Les choses sont en train de prendre forme, il faut que chacun en prenne conscience et que chacun prenne ses responsabilités", a-t-il renchéri en estimant, alors qu'un prochain épisode de grève de deux jours débutera dimanche à 20H00, qu'il "n'y a plus tellement de raisons pour pénaliser à ce point les Français avec ces grèves à répétition".
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