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Une poignée de "dames pipi" parisiennes en résistance

Publié le 20/08/2015 18:23
Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force Ouvrière, s'exprime lors d'une manifestation devant les toilettes publiques fermées de Montmartre, à Paris, le 20 août 2015 (Photo SYLVIE HUSSON. AFP)

Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force Ouvrière, s'exprime lors d'une manifestation devant les toilettes publiques fermées de Montmartre, à Paris, le 20 août 2015 (Photo SYLVIE HUSSON. AFP)

Elles ne veulent pas être "jetées comme des serpillères". Depuis un mois, onze "dames pipi" parisiennes manifestent tous les jours à Montmartre pour que le nouveau gestionnaire des toilettes de plusieurs hauts lieux touristiques les reprenne.

"On est tombées du ciel, c'est comme si on n'existait plus. Je ne dors plus, j'ai trois enfants et un loyer à payer", explique la plus jeune de ces femmes, Mahliya Fiokouna, 45 ans.

Depuis sept ans, elle nettoie les lieux d'aisance du Sacré-Coeur, de Notre-Dame ou encore de la Place de l’Étoile. La majorité des salariés ont la soixantaine et plus de 20 ans d'ancienneté.

Toutes ont été mises sur la touche par la société néerlandaise 2theloo (pointWC), qui a repris au 1er juillet la demi-douzaine de toilettes gérées jusqu'alors par Stem propreté, leur précédent employeur.

"Ils veulent faire des boutiques de luxe et disent qu'on n'a pas le profil qu'ils cherchent, ils veulent qu'on parle plusieurs langues", poursuit Mahliya, la voix couverte jeudi par les sifflets d'une soixantaine de militants FO et le slogan "2theloo, voyou".

Pour le syndicat, le nouveau prestataire tente de s'affranchir du droit. "Il y a encore des règles en France, un droit du travail", a déclaré Jean-Claude Mailly. Devant les sanisettes fermées du Sacré-Coeur, le patron de FO est venu saluer un "combat (...) de dignité et de principe".

La convention collective du secteur de la propreté prévoit le transfert automatique des salariés. La précédente passation de marché en 1999 s'était déroulée "sans problème", se souvient Gabrielle, 62 ans, dont 29 à passer la serpillère.

Mais 2theloo, qui promet de gros travaux pour transformer ces sanisettes en "boutiques-toilettes" design, "avance qu'elle va proposer un service différent et ne se sent pas tenue d'une obligation de reprise des salariés", explique un porte-parole de la Ville de Paris, qui "déplore" cette situation.

- 'Golden boy des pissotières' -

Un argument trop facile pour Jean Hédou, de la Feets-FO. "L'activité réelle" de 2theloo, "c'est le nettoyage", dit-il. 2theloo et son PDG en France Almar Holtz, le "Golden boy des pissotières", veulent "réduire le coût de la main d’oeuvre" en ne reprenant pas ces salariées, estime le syndicaliste.

Contactée plusieurs fois par l'AFP, la société n'a pas donné suite.

Selon la Ville de Paris, une convention d'"occupation du domaine public" a succédé à une "délégation de service public" et il était juridiquement impossible d'inclure "une clause spécifique" de reprise des salariés. Mais "2theloo avait connaissance depuis le début de l'appel d'offres de la nécessité de reprendre ces 11 salariées" et "la Ville de Paris n'acceptera pas que les salariées se retrouvent sur le carreau", dit à l'AFP un porte-parole.

Les salariées ont assigné en référé aux Prud'hommes leur ex-employeur et 2theloo (pointWC). L'affaire sera examinée le 26 août.

En attendant, "comme elles sont transférables" et "pas licenciées", "elles ne bénéficient d'aucun droit" et ne peuvent prétendre à une indemnité chômage, s'indigne Malamine Ndiaye (FO-propreté).

Le délégué rappelle le précédent bras de fer entre 2theloo et d'autres agents de nettoyage, en janvier dans plusieurs gares parisiennes.

Au bout d'une semaine de grève, et la pression de la SNCF, la trentaine de salariées avaient obtenu d'être reprises.

Dans les gares, la montée en gamme promise est-elle au rendez-vous? Gare de Lyon, le décor est soigné, on peut acheter des articles de toilette, des gadgets mais les lieux "ne sont pas spécialement propres", s'indigne une usagère, la "dame pipi" étant selon elle trop "affairée" à renseigner ses clients. Le tarif, lui, a grimpé de 60 à 80 centimes.

Les résultats d'une première enquête de satisfaction sont attendus pour septembre, indique-t-on à la SNCF.

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