Le Premier ministre grec Alexis Tsipras envisage de recourir à des législatives anticipées pour regagner une majorité parlementaire mise à mal par la contestation par une partie de ses troupes du plan d'aide en cours de négociation avec les créanciers du pays.
Cette annonce survient alors que les responsables des institutions créancières de la Grèce sont à Athènes pour discuter du troisième plan d'aide au pays, estimée autour de 82 à 86 milliards d'euros.
"Si nous n'avons pas de majorité parlementaire, nous serons contraints à des élections", a déclaré mercredi M. Tsipras, dans une interview à la radio Sto Kokkino.
Au pouvoir depuis seulement six mois, il a précisé être "le dernier à vouloir des élections".
Mais il a pris acte de la division au sein de Syriza, le parti de la gauche radicale qu'il dirige, dont plus de 30 des 149 députés ont voté, les 15 et 22 juillet, contre les premières réformes demandées par les créanciers de la Grèce.
Désormais, et malgré le soutien de 13 députés du parti de droite souverainiste Anel avec lequel gouverne Syriza, le Premier ministre ne dispose plus du seuil minimum de 151 députés (sur 300) pour appliquer le nouvel accord sans le soutien de trois partis d'opposition (Nouvelle Démocratie, Pasok, Potami) qui lui apportent à chaque fois leurs 106 voix.
Le prochain test sera l'adoption au parlement, sans doute dans le courant du mois, de l'intégralité du plan d'aide sur trois ans dont les modalités sont en train d'être étudiées par les dirigeants grecs et les représentants des créanciers UE et FMI.
A Athènes, les responsables de la mission de négociation, qui n'avaient plus mis les pieds en Grèce depuis l'année dernière, sous l'ancien gouvernement de coalition droite-socialistes d'Antonis Samaras, arrivent les uns après les autres.
La dernière attendue, jeudi selon le gouvernement grec, est la chef de mission du FMI, Delia Velculescu. Tout comme Rasmus Rüffer pour la Banque centrale européenne (BCE) et Nicola Giammarioli pour le Mécanisme européen de stabilité (MES), elle est nouvelle dans le dossier grec, suivi depuis 2014 par Declan Costello pour la Commission européenne.
Les équipes techniques sont, elles, à pied d'oeuvre depuis le début de la semaine à Athènes pour passer en revue l'état des finances grecques.
"La négociation se déroule dans de bonnes conditions de coopération", a jugé le commissaire européen chargé des Affaires économiques, Pierre Moscovici. Mina Andreeva, une porte-parole de la Commission, a décrit une "coopération constructive et sans problème". "Très bon climat", a renchéri le gouvernement grec.
- Syriza en congrès -
Le travail des équipes techniques -une cinquantaine de personnes, selon une source européenne- devrait s'achever d'ici à vendredi soir, estime Athènes.
Selon la source européenne, toutes les discussions doivent être bouclées dans moins de deux semaines, le 10 ou le 11 août, date après laquelle le calendrier deviendra "trop serré", notamment pour le vote au parlement grec en vue du versement d'un premier acompte.
Les caisses du pays sont vides et la Grèce doit rembourser quelque 3,2 milliards à la BCE le 20 août.
Si le Premier ministre n'arrive pas à reprendre sa majorité en main lors du prochain vote, le congrès exceptionnel de Syriza, que M. Tsipras veut convoquer "début septembre", lancera la recomposition interne du parti en vue d'élections, sans doute à l'automne.
Un comité central de Syriza doit se réunir jeudi et probablement décréter la tenue du congrès.
Reste à savoir quelle sera la ligne de conduite du courant contestataire, qui affirme représenter les voix du "non" à l'austérité, vainqueur du référendum du 5 juillet.
"Celui que ne respectera pas les décisions collectives (du parti, ndlr) devra rendre son siège" de députés, a prévenu Tsipras.
La ligne d'Alexis Tsipras reste majoritaire au sein du parti et il est toujours populaire dans l'opinion publique. Mais le chef du gouvernement a aussi dit être conscient de l'aggravation des difficultés économiques.
Selon la presse grecque, les créanciers estiment que le PIB du pays va reculer de 2 à 3% cette année, contre une prévision de croissance de 0,5%.
Ce retournement de conjoncture est dû principalement aux atermoiements de la Grèce et de ses créanciers, qui font tourner le pays au ralenti depuis que Syriza est arrivé au pouvoir en janvier, et au contrôle des capitaux, engagé le 29 juin pour protéger les banques, mais qui entrave l'économie.
Cette dégradation rend d'autant plus inévitable une restructuration de la dette grecque que la directrice générale du FMI Christine Lagarde a de nouveau jugé "inévitable" mercredi pour que le renflouement du pays soit "crédible".
Alexis Tsipras s'est montré certain que cette restructuration interviendra "en novembre, après le premier audit du programme" d'aide financière